- mer, 01/08/2012 - 16:09
Lors de son ultime discours, face aux injustices, le diplomate belge n’a pas pu cacher son émotion. Il quitte fin juillet notre pays. Arrivé à Kinshasa voici près de trois ans alors que les relations entre son pays et le nôtre n’étaient pas des plus excellentes, Dominique Struye de Swielande a livré samedi 21 juillet dans la soirée dans les jardins de sa résidence à la Gombe son dernier discours public à l’occasion de la fête nationale belge.
LE SOFT INTERNATIONAL N° 1177 DATE LUNDI 23 JUILLET 2012
Ministres, députés, sénateurs, diplomates, chefs d’entreprises et... surtout des Belges venus en nombre comme chaque année à ce géant barbecue où bière, frites et saucisse sont servies à gogo... Le diplomate qui va être remplacé par un ancien du Zaïre (et du Rwanda) Michel Latchenko a pris la parole après la Congolaise et la Brabançonne chantée en français, en flamand et an allemand, les deux hymnes nationaux chantés en playback.
C’est pour exprimer la profondeur de la relation «unique car historique» qui unit son pays au nôtre et expliquer comment le Royaume a été particulièrement ces derniers mois en première ligne aux côtés du Congo de Kabila.
«LA BELGIQUE PARTENAIRE UNIQUE CAR HISTORIQUE».
Dominique Struye de Swielande n’a pu contenir son émotion quand il en vient à paraphraser Joseph Conrad dans un texte peu connu - on comprend pourquoi tellement ce texte décrit les injustices dont souffre notre pays qui «reste cette terre qui sollicite notre potentiel de joie et d’admiration, notre sensibilité au mystère qui nous entoure, notre sens de la compassion, de la beauté et de la douleur, le sentiment mystérieux qui nous lie au monde entier, et la subtile mais inébranlable foi dans la solidarité qui unit la solitude de cœurs innombrables dans les rêves, les joies, les peines, les aspirations, les illusions, l’espoir et la peur, qui rapproche tout homme de son prochain, qui rassemble l’humanité entière, les morts et les vivants, les vivants et ceux qui ne sont pas encore nés».
Quelques phrases à retenir de cet ultime discours officiel de ce grand Belge, l’un des rarissimes à avoir été conseiller diplomatique de son pays avant d’être nommé ambassadeur, qui, le premier le 20 décembre 2011, au soir de la prestation de serment de Joseph Kabila Kabange en qualité de président élu du pays, appelait dans ces mêmes colonnes du «Soft international», en exclusivité, de façon si prophétique l’opposant étienne Tshisekedi wa Mulumba à s’engager désormais dans une «opposition constructive» - la communauté internationale ayant reconnu l’élection présidentielle r-dcongolaise et Joseph Kabila Kabange comme président du pays:
«Les dernières années ont vu ces relations (belgo-congolaises) évoluer très favorablement (...).
Il en sera de même dans les mois qui viennent (...).
Et enfin la réussite du Sommet de la Francophonie. La Belgique se réjouit de ce que ce sommet puisse se tenir ici à Kinshasa dans le plus grand pays francophone du monde (...). Le Congo ne peut qu’opter pour la résilience, c’est-à-dire, la faculté de rebondir et de travailler à bâtir un Congo plus beau qu’avant. La Belgique reste à cet égard le partenaire unique, car historique, qui demeure engagé à accompagner et à soutenir la RDC dans cette voie».
Puis: «Si le Rwanda proclame ne pas faire partie du problème, il doit incontestablement faire partie de la solution en cessant tout appui aux groupes armés».
Ci-après, en intégralité le discours de Dominique Struye de Swielande:
Distingués Hôtes de Marque,
Chers amis Congolais, Bandeko ba bolingo Congolais,
Chers compatriotes, Best landgenoten
Chers collègues,
Un grand merci tout d’abord, chers compatriotes et Vous Congolais pour votre présence ici aujourd’hui, qui témoigne de votre attachement à la Belgique, à ses institutions et à ses traditions. Avant toute chose, je souhaiterais rappeler ici l’origine du choix de la date du 21 juillet pour notre fête nationale. Contrairement à presque tous les autres pays qui ont choisi comme jour de fête nationale soit le jour de leur indépendance, comme la RDC, soit un autre grand fait politique ou fait d’armes, la Belgique a choisi le jour de la joyeuse Entrée de son premier Roi Léopold Ier et de sa prestation de serment à Bruxelles le 21 juillet 1831.
C’est symbolique et révélateur de l’identité et de la nature de notre pays et de notre peuple.
Les Joyeuses Entrées des Rois et Princes dans les villes constituent une vieille tradition remontant au Moyen-âge et qui reflète la proximité et la complicité entre le Roi, Chef de l’état, et son peuple. Le titre officiel du Roi est d’ailleurs celui de Roi des Belges en non Roi de Belgique.
Le Roi est par définition bon et protège le peuple contre tous les abus possibles. Et comme une Joyeuse Entrée se célébrait toujours à force de bière, d’agapes, de chants et de danses folkloriques, je souhaite que la fête d’aujourd’hui puisse se dérouler dans ce même état d’esprit.
Elle me donne aussi l’occasion de réitérer ici haut et fort l’importance et la valeur des bonnes relations de confiance qui existent entre mon pays la Belgique et la RDC.
Les dernières années ont vu ces relations évoluer très favorablement, comme en a témoigné la présence de LLMM. Le Roi Albert II et la Reine aux festivités du Cinquantenaire de la RDC. Cet accompagnement et soutien de la part de la Belgique au peuple congolais doit se poursuivre dans un même esprit de respect, de partenariat égalitaire et de réciprocité. L’actuel Ministre des Affaires étrangères belge, Monsieur Didier Reynders, l’a manifesté à maintes reprises au courant des derniers mois et cela même dans des circonstances difficiles.
N’est-il pas venu à Kin dès la fin mars encourager les Autorités congolaises à prendre des mesures indispensables pour regagner la confiance de la population et de la Communauté Internationale?
N’a-t-il pas été récemment un des premiers à s’exprimer clairement en faveur de l’intégrité de la souveraineté congolaise contre l’ingérence rwandaise? Il en sera de même dans les mois qui viennent. Le Congo est confronté à plusieurs défis importants, à commencer par le rétablissement de la paix à l’Est. La RDC a le droit et le devoir d’exercer sa souveraineté sur l’entièreté de son territoire. Si le Rwanda proclame ne pas faire partie du problème, il doit incontestablement faire partie de la solution en cessant tout appui aux groupes armés.
La RDC de son côté devra poursuivre son effort de Réforme du Secteur de Sécurité. Il est aussi crucial pour la RDC de développer la bonne gouvernance au service de la révolution de la modernité, telle que prôné par le Président.
Je ne puis que souhaiter un plein succès à cet égard au gouvernement du Premier Ministre Matata Ponyo. C’est le meilleur moyen d’améliorer les conditions sociales de la population. Je dois aussi évoquer la poursuite du cycle électoral et des efforts en faveur des Droits de l’homme.
Le renouveau de la CéNI, tel que réclamé par beaucoup de Congolais, devrait rétablir la confiance dans cette institution et rendre possible la tenue des élections provinciales et locales dans de meilleures conditions. Et enfin la réussite du Sommet de la Francophonie. La Belgique se réjouit de ce que ce sommet puisse se tenir ici à Kinshasa dans le plus grand pays francophone du monde.
Je viens de citer quelques défis pour lesquels la Belgique est prête à accompagner et soutenir la RDC. Pour faire face à ceux-ci, les autorités congolaises et le peuple congolais sont placés devant un choix fondamental: soit celui de la résignation, soit celui de la résilience. Le Congo ne peut qu’opter pour la résilience, c’est-à-dire, la faculté de rebondir et de travailler à bâtir un Congo plus beau qu’avant. La Belgique reste à cet égard le partenaire unique, car historique, qui demeure engagé à accompagner et à soutenir la RDC dans cette voie. Elle le veut en poursuivant dans ses relations bilatérales avec la RDC un dialogue politique constant, ouvert et franc, ainsi que par sa politique de coopération au développement, sa coopération militaire, son encouragement aux investisseurs belges à revenir au Congo et enfin sa collaboration consulaire et l’accueil qu’il réserve à de nombreux Congolais en Belgique. Qu’il me soit enfin permis à l’occasion de cette fête nationale de remercier la RDC et toute sa population pour l’hospitalité généreuse qu’elle offre à tous les Belges vivant au Congo. à ceux-ci, je demande aussi de continuer à participer à ce courant de sympathie, à cet élan d’amitié, à cette connaissance réciproque qui caractérisent les liens historiques qui unissent nos deux peuples.
Quant au Congo, je souhaite sincèrement, en guise de conclusion et pour le dire dans les mots de Joseph Conrad, que ce pays reste cette terre qui sollicite notre potentiel de joie et d’admiration, notre sensibilité au mystère qui nous entoure, notre sens de la compassion, de la beauté et de la douleur, le sentiment mystérieux qui nous lie au monde entier, et la subtile mais inébranlable foi dans la solidarité qui unit la solitude de cœurs innombrables dans les rêves, les joies, les peines, les aspirations, les illusions, l’espoir et la peur, qui rapproche tout homme de son prochain, qui rassemble l’humanité entière, les morts et les vivants, les vivants et ceux qui ne sont pas encore nés».
Que vive l’amitié entre la RDC et la Belgique en ce jour de la fête nationale belge.
Belgique, RDC oyé.
Urafaki udume kati ya Congo na Ubelgigi.