- lun, 14/09/2020 - 17:38
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1499|LUNDI 14 SEPTEMBRE 2020.
L’ancien Premier ministre, ancien ministre des Finances, Augustin Matata Ponyo Mapon est inquiet voire très inquiet pour la tournure que pourraient prendre certains événements en rapport avec sa gestion passée des projets économiques. Après être resté longtemps «à la réserve de la République» - au propre comme au figuré - le voici qui sort du bois, au devant de la scène, lui-même. Exposé...
Le projet échoué de Bukanga Lonzo, par exemple, sur la nationale n°1, entre Kinshasa et la ville de Kenge, dans la province de Kwango, y est pour beaucoup.
LE PREMIER MINISTRE MONTRE SES CROCS.
A-t-il poussé le bouchon trop loin au point de sortir de son mutisme le trop prudent Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba dont pourtant tout le monde connaît le verbe, le courage voire la témérité? Celui qui, il y a peu, avait craché sa vérité à un team de hauts cadres de l’ex-parti présidentiel PPRD, majoritaire au Parlement qui lui réclamait sa démission en les traitant les yeux dans les yeux de tous les noms d’oiseaux, déclarant qu’il n’avait jamais sollicité le poste de Premier ministre, qu’il n’avait jamais choisi ses ministres, que les membres de son cabinet avaient été désignés par le PPRD, jamais par lui, les accusant d’être des «moins que rien» - avant de claquer la porte et de s’en aller - sait se faire entendre. Souvent, cet homme d’Etat - il fut tout sous Mobutu - qui a fait sienne la tempérance comme mode de gouvernance, préfère ronger son frein plutôt que d’étaler frustrations et colères.
Mais les leçons de gestion administrées perpétuellement, sur tous les théâtres, dans tous les cénacles, dans tous les auditoires par le «Monsieur Mapon-Macro Economique» - l’expression d’un de ses proches - ont été trop violentes que le Katangais a voulu montrer un peu ses crocs. Si, depuis qu’il a été nommé Premier ministre, chef du Gouvernement, Sylvestre Ilunga Ilunkamba a décidé d’aller voir ailleurs que son Katanga natal, c’est au Kwango où aucun événement majeur n’imposait sa sortie qu’il s’est rendu. Mais en faisant un atterrissage en douceur - Ilunga Ilunkamba avait choisi non seulement d’amener avec lui son fauteuil de Premier ministre afin que nul ne l’occupe même provisoirement et pas, en tout cas, le VPM en charge de l’Intérieur Gilbert Kankonde Malamba, l’expérience rend sage, mais on est jamais trop prudent par ces temps de Covid-19 - mais il a aussi refusé d’emprunter la voie terrestre comme l’avait toujours fait Augustin Matata Ponyo Mapon sur une route passable afin de mieux palper du doigt les réalités d’une province voisine et nourricière de la Capitale.
Qu’importe ! Aussitôt le site du parc agro-industriel visité, les membres du Gouvernement Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le Premier ministre en tête, ont balancé l’homme à l’initiative d’un projet imaginé par des Ouestafs, présenté comme LA solution au déficit alimentaire chronique national, dévoilé en grande pompe en septembre 2014 comme en effet le projet du siècle, qui a englouti sinon 100 millions de $US, au moins 83 millions de $US sortis des caisses du Trésor mais qui s’est effondré peu après.
NI, NI, NI.
RIEN DE RIEN. ECHEC ET MAT.
Si, au lancement, lors d’une opération de semis de 100 tonnes de maïs et de haricot, le Premier ministre Matata sut déplacer personnellement le président de la République Joseph Kabila Kabange et tout son Gouvernement, comme les notabilités du pays, il réussit le même exploit, sept mois plus tard, le 15 mars 2015 à la première récolte de maïs en mobilisant le président de la République Kabila, son Gouvernement, le pays, les médias nationaux et internationaux.
Mais déjà, la récolte sur ce site, dans un espace de territoire de plus de 70.000 ha entre les rivières Kwango et Lonzo, à 275 de Kinshasa, était à la peine, pas au rendez-vous. Pourtant, Matata avait annoncé qu’il allait essaimer le pays en Bukanga Lonzo.
Si la première récolte eut tout de même lieu, elle ne fut suivie d’aucune autre... Et aucune smart city ne sortit du sol, nulle part dans le pays, quand des expériences de smart cities se multiplient en Afrique sub-saharienne.
Y-a-t-il eu détournement? Divers mouvements en sont convaincus. Et la visite de Sylvestre Ilunga Ilunkamba à Bukanga Lonzo n’a pas renforcé l’image de gestionnaire modèle du Premier ministre honoraire dans le pays et à l’étranger. D’où la multiplication de ses points de presse qui dévoilent une ligne de défense ?
Cet homme qui, tout au long de son passage aux affaires - ministre des Finances, Premier ministre après avoir dirigé le BCeCO, le Bureau Central de Coordination de l’aide de la Banque Mondiale au Congo - n’a jamais voulu, ni su parler politique, encore moins PPRD mais qui, de temps à temps, ces derniers temps, s’affiche PPRD, a donc choisi de contre-attaquer.
Par un livre, par son projet Congo Challenge mais surtout en apportant les premières réponses face à la saillie des mouvements citoyens et des réseaux sociaux dont l’un des slogans devenu viral consiste à dire : «Il a semé un grain de maïs à Bukanga Lonzo, il a récolté un campus universitaire bling-bling à Kindu».
BUKANGA LONZO?
DU GACHIS D’ETAT...
Pour rappeler ces phrases bibliques : «Puisqu’ils ont semé du vent, ils moissonneront la tempête», Osée 8/7 ; « ne vous y trompez pas : on ne se moque pas de Dieu. Ce qu’un homme aura semé, il le moissonnera aussi», Galates 6/7 ; «Sachez-le, celui qui sème peu moissonnera peu, et celui qui sème abondamment moissonnera abondamment », Corinthiens 9/6. Tout comme Matthieu 13:23 : «Celui qui a reçu la semence dans la bonne terre, c’est celui qui entend la parole et la comprend; il porte du fruit, et un grain en donne cent, un autre soixante, un autre trente».
Cela en dit tout sur sinon des accusations de détournement, du moins, sur de très graves suspicions de détournement quand surtout ce 19 août, le trop tempéré Sylvestre Ilunga Ilunkamba pousse les caméras à filmer des épaves abandonnées, des épandeurs n’ayant jamais servi... Bukanga Lonzo? Du gâchis d’Etat...
La réaction du Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon : «Mais quand vous décidez de coudre une chemise et que vous ne terminez pas, si l’autre qui reprend votre place, ne la termine pas, à qui la faute?» (TV5 Afrique).
Matata s’en prend clairement à Samy Badibanga Ntita à qui il a remis les clés mais qui certes n’a duré à l’Hôtel du Gouvernement que l’espace d’un matin (17 novembre 2016 - 18 mai 2017, 6 mois et 1 jour avec une équipe gouvernementale désignée le 19 décembre et qui a passé moins de temps au travail) et certainement à celui qui a fait plus longtemps au 5, avenue de Lemera, à savoir, Bruno Tshibala Nzenze qui, nommé le 18 mai 2017, a rendu les armes le 7 septembre 2019 à Ilunga Ilunkamba.
Mais dès début juillet, précisément le lundi 6 juillet, un communiqué de l’ex-Premier ministre donne le ton : Matata n’a jamais géré des fonds destinés aux projets d’investissements.
« Point n’est besoin de rappeler à l’opinion tant nationale qu’internationale que la Primature, sous son mandat, tout en tenant un centre d’impulsion et d’évaluation rigoureux de l’action gouvernementale, en harmonie avec le Président de la République, n’a jamais été ni un centre d’ordonnancement des fonds publics, ni une unité d’implémentation des projets du Gouvernement, encore moins un lieu de décaissement ou de gestion des fonds destinés aux projets d’investissement », écrit cette mise au point.
Puis, Matata, qui, dans ce communiqué dit se réserver le droit d’ester en justice pour tous ces faits invraisemblables et répréhensibles par la loi pénale, soutient par le canal de son cabinet, que le projet du parc agro-industriel de Bukanga Lonzo, le marché international de Kinshasa à Maluku, des locomotives neuves pour la Société Nationale des Chemins de fer du Congo (SNCC), de la société Congo Airways, de Transco, des bus Esprit de vie, la relance de la Société Congolaise des Transports et Ports (SCPT) etc, n’ont pas été été gérés par la Primature et la coordination était assurée par les ministères. S’agissant du parc agro-industriel, deux ministères sont visés : celui de l’Agriculture et celui des Finances.
Qui sont ces ministres sectoriels ? Matata 1, Finances (ministre délégué auprès du Premier Ministre, Patrice Kitebi Kibol Mvul avec vice-ministre Roger Shulungu Runika), Agriculture et Développement Rural (ministre Jean Chrisostome Vahamwiti Mukesyayira) ; Matata II, du 7 décembre 2014 au 14 novembre 2016, Finances (ministre Henri Yav Mulang avec vice-ministre Albert Mpeti Biyombo); Agriculture, Pêche et Élevage (Isidore Kabwe Mwehu, puis Émile Mota Ndongo Kang).
Gros souci et risque d’être mapé pour Mapon : l’IGF (Inspection Générale des Finances) et son CS Jules Alengeti Key décidé de faire gagner son pari à Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, veille au grain. Traque tout...
D. DADEI.