- mer, 14/03/2012 - 21:39
MISE EN LIGNE LE 15 MARS 2012 | LE SOFT INTERNATIONAL N° 1155 DATÉ 09 MARS 2012.
Le Palu Adolphe Muzito Fumunzi a présenté mardi 6 mars la démission de son équipe gouvernementale au président de la République Joseph Kabila Kabange, plus de trois mois après les élections législatives de fin 2011, alors que vingt-deux de ses quarante-cinq ministres élus députés lors des législatives du 28 novembre 2011 optaient pour l’exercice de leur mandat de député abandonnant leurs fonctions ministérielles et remettant en groupe leurs lettres au président du bureau provisoire de l’Assemblée nationale, l’Udps Timothée Nkombo Nkisi.
Muzito et ses ministres ont invoqué plusieurs articles de la Constitution de la République (97 et 110 notamment), de même que ceux de la Loi électorale (77 et 78 notamment) qui érigent un régime d’incompatibilité ou de non-cumul des fonctions.
Dès le lendemain 7 mars, le Président de la République qui avait pris acte de cette démission en tirait les conséquences en confiant par ordonnance les fonctions de Premier ministre intérimaire au Vice-premier ministre PPRD-MP Louis Koyagialo Ngbase Te Gerengbo. Jusqu’à sa nomination, Koyagialo était en charge des Postes et Nouvelles technologies.
UNE MISSION D’INFORMATION DE TROIS JOURS.
En l’espèce, le Président de la République appliquait l’art. 90 de la Constitution qui stipule: «Le Gouvernement est composé du Premier ministre, de ministres, de Vice-ministres et, le cas échéant, de Vice-premier ministres, de ministres d’Etat et de ministres délégués. Il est dirigé par le Premier ministre, chef du Gouvernement. En cas d’empêchement, son intérim est assuré par le membre du Gouvernement qui a la préséance». Le communiqué du DirCab du Président de la République, Gustave Beya Siku, signé le mardi 6 mars 2012, était clair à ce propos: «En attendant la nomination d’un nouveau Premier ministre, suivie de la formation d’un nouveau gouvernement et, eu égard à l’incompatibilité avérée dans son chef et celui des autres membres du gouvernement ayant opté pour l’exercice de leur mandat parlementaire, le gouvernement fonctionnera, en vue d’expédier les affaires courantes, sur base des dispositions pertinentes de la Constitution et de l’Ordonnance n°08/073 du 24 décembre 2008 portant organisation et fonctionnement du gouvernement, modalités pratiques de collaboration entre le président de la République et le Gouvernement ainsi qu’entre les membres du gouvernement».
Puis: «L’intérim des autres membres du gouvernement concernés sera assuré par les ministres désignés».
Organiser l’intérim n’était pas une fin en soi. Le Président de la République veut aller vite voulant faire face aux obligations qu’impose l’exercice de sa haute charge d’Etat.
Dès le lendemain de la mise en place de l’intérim gouvernemental, le Président de la République revenait à la charge en nommant informateur le ministre honoraire de la Défense et des Anciens combattants, l’UNADEF-MP Charles Mwando Nsimba Kabulo. En l’espèce, le président de la République appliquait à la lettre l’art. 78, al. 2 de la Constitution qui stipule que «le Président de la République confie une mission d’information à une personnalité en vue d’identifier une coalition» parlementaire.
Aux termes de la notification faite le 8 mars par le DirCab Gustave Beya Siku, l’Honorable Charles Mwando Nsimba a mission «d’identifier formellement la majorité parlementaire devant permettre la nomination d’un Premier ministre».
La lettre du DirCab indique que «l’Honorable Charles Mwando Nsimba prendra contact avec les partis, groupements et personnalités politiques toutes tendances confondues siégeant au sein du parlement».
On pourrait s’interroger sur le pourquoi de cette nomination. En clair, pourquoi le Président de la République n’a-t-il pas voulu faire l’économie d’un informateur en nommant directement le formateur du nouvel Exécutif dès lors que depuis la publication des résultats des Législatives par la Céni, la majorité a bien succédé à la majorité totalisant plus de 340 Députés sur les 500 qui forment l’Assemblée nationale.
La réponse est certainement que le Président veut appliquer à la lettre la Constitution, toute la Constitution et rien que la Constitution et montrer son souci de «veiller au respect de la Constitution» et d’assurer «le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des institutions», tel que le prévoit l’art. 69 de la loi fondamentale.
En même temps, il n’est pas impossible que le Président de la République cherche à donner l’occasion à tous les partis politiques représentés à l’Assemblée nationale ainsi qu’à toutes les personnalités politiques de se prononcer en s’inscrivant sur la liste de la majorité parlementaire. La lettre du DirCab n’est-elle pas plus claire lorsqu’elle indique que «l’Honorable Charles Mwando Nsimba prendra contact avec les partis, groupements et personnalités politiques toutes tendances confondues siégeant au sein du parlement»?
Dans son discours d’investiture prononcé le 20 décembre 2011 sur l’esplanade de la Cité de l’Union Africaine, le nouveau président de la République avait en effet déclaré qu’il était prêt à travailler avec tous ses compatriotes qui ont la passion du Congo.
Or, précisément, la Constitution est claire à ce propos: «Le Président de la République nomme le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci». Or, on sait que recevant récemment une délégation des Evêques du Congo à sa ferme de Kingakati, à l’Est de la Capitale Kinshasa, si le Président de la République a rappelé sa promesse de travailler avec tous ses compatriotes - de quelque bord politique qu’il soit -, il a exclu en même temps l’hypothèse de former un Gouvernement d’union nationale.
Ce qui revient à dire que s’il se trouve des membres de l’opposition pour travailler à l’œuvre de reconstruction nationale entamée par Joseph Kabila Kabange, ils devront au préalable se faire connaître, intégrer la majorité présidentielle, en prendre expressis verbis la carte en se comportant désormais comme membres d’une famille politique, celle de Joseph Kabila Kabange. Ce qui, en démocratie, est plus clair.
Il reste que si le besoin d’ouverture est réelle, cette ouverture ne saurait se concevoir que vers des partis et personnalités susceptibles d’apporter des réels gains politiques. Selon le journal français Le Monde (daté du 7 mars), les résultats provisoires des Législatives annoncés le 2 février par la Commission électorale nationale indépendante ont donné lieu à près de 500 recours en contestation. L’Udps qui est désormais la première force d’opposition à l’Assemblée dispose de 41 sièges mais ses élus qui y ont pris place, sont menacés d’exclusion par leur parti.
Jeudi 1er mars, une vingtaine de députés de l’Udps et alliés ont siégé à la plénière. Certains ont confirmé, dans une déclaration conjointe, qu’ils participeront désormais «sans complaisance» aux travaux de la chambre basse du Parlement.
«Je ne vous parle pas de participer pour aller cautionner. Je vous parle d’aller siéger pour barrer la route aux ennemis de la démocratie», a déclaré Martin Fayulu Madidi, député Ecide (Engagement pour la citoyenneté et le développement) ayant choisi de siéger à l’Assemblée nationale.
Cette position divise l’UDPS et ses alliés. Fayulu, qui siège désormais à l’Assemblée nationale, explique son choix: «Tshisekedi ne peut pas se dédire. C’est un problème d’honneur. Nous disons que les institutions actuelles sont illégitimes». Parmi ceux qui signent aux abonnés absents, on cite Serge Mayamba, Eugène Diomi Ndongala et Roger Lumbala Tshitenga.
T. MATOTU.