Le clergé mijote un coup
  • lun, 07/07/2014 - 02:36

L’accalmie n’aura été que de courte durée.

Gens de la Patrie, le peuple veut la démocratie, toute la démocratie, rien que la démocratie et il a raison. L’Etat a l’obligation de la lui donner aujourd’hui et maintenant sans atermoiement. Mais face à l’impératif de stabilité politique et de construction nationale qui seules garantissent la croissance économique et le recul de la pauvreté, face aux risques récurrents d’extinction de la Nation, que choisir?
Question cornélienne à laquelle doivent répondre l’homme politique et la Nation. Question à laquelle a su répondre l’Egypte du général Abdel Fattah al-Sissi qui, au nom de la survie de la Nation, a arrêté et jeté en prison, il y a un an, le premier président démocratiquement élu et qui vient de recevoir un triomphe du Continent à Malabo, en Guinée Equatoriale, au sommet de l’Union Africaine. Question à laquelle doit répondre en toute responsabilité la Majorité présidentielle en reprenant la parole à des opérateurs politiques qui, depuis des mois, privatisent les médias publics, distillent un discours inaudible lexicologiquement parlant, solitaire, sans n’avoir rien fait avancer dans l’opinion, n’exprimant que des incohérences idéologiques, donnant au monde une hideuse image de la classe politique nationale et de l’intellectuel congolais. Existe-t-il des maîtres à penser dans ce pays qui moulent un savoir-vire commun? Si oui, où sont-ils? Un Gouvernement, pour la toute première fois de l’histoire du pays, sous l’impulsion du Président de la République Joseph Kabila Kabange et la direction du Premier Ministre Matata Ponyo a décidé de les sortir des bas-fonds pour les porter au pinacle de la République.

Cela paraissait manifestement invraisemblable. L’accalmie observée ces jours derniers sur la ligne de front entre Eglise catholique et Etat congolais avait-il à avoir avec les promesses présidentielles faite en direction de l’OR, l’opposition républicaine? Il a fallu que le Chef de l’Etat hésite et en fasse état dans son allocution du jour de l’Indépendance le 30 juin - s’engageant à accélérer le processus de réalisation des recommandations des Concertations nationales, «de manière méthodique mais sans précipitation» - pour que dans l’opposition radicale, des cartons rouges sortent des poches. Il en est ainsi du groupe recruté par le président du Sénat présenté comme la dot à porter à l’union envisagée même si, au sein de la Majorité présidentielle, ce tournant était attendu.

ENTREE EN FORCE EN POLITIQUE.
«C’est le bal des chauves. Il a suffi qu’on attende un peu, voilà qu’ils se découvrent. Ils n’ont jamais été des partenaires. Ils ne pouvaient l’être. C’était au départ contre nature. Comment allaient-ils assumer le bilan?», théorise un membre connaisseur de la majorité.
Et comme depuis les années Mobutu, l’opposition au Congo a deux face - l’opposition politique déclarée, puis son alliée, l’Eglise catholique -, après la fatwa délivrée par les radicaux, voici ceux-ci être rejoints par les calotins qui brandissent un empeachment et appellent, dans des paroisses, leurs ouailles à battre le pavé contre «les modifications constitutionnelles susceptibles de rompre un vouloir-vivre collectif et des valeurs fondamentales acceptées par l’ensemble du peuple» et à «faire preuve de vigilance pour s’opposer par tous les moyens légaux à toute tentative de modification des articles verrouillés», «d’interpeller leurs élus en leur demandant de dire leur claire option concernant la question constitutionnelle».
Les cathos fondent cet appel du message de la CENCO, la Conférence Episcopale Nationale du Congo, rendu public le 1er juillet. Rien moins qu’une entrée (un retour) en force en politique.
Le débat qui porte sur la révision constitutionnelle demande à être définitivement décomplexé. Aucun texte au monde ne saurait être figé. Jour après jour, dans le monde, les parlements procèdes à des révisions constitutionnelles. Toute Constitution a établi la procédure de révision. Il ne saurait exister nulle part un point de non-retour susceptible d’être un casus belli. Les Etats-Unis ont vu l’un de leurs présidents postuler pour la quatrième fois à la Maison Blanche et être réélu. C’est Franklin Denalo Roosevelt (1882-1945) qui est passé outre la tradition des deux mandats. Il a fallu qu’à la Convention démocrate de Chicago, e le peuple s’enflamme et hurle: «Nous voulons Roosevelt... Le monde veut Roosevelt!». Rien moins qu’un référendum. Si les Etats-Unis ont fini par inscrire la limitation dans la Constitution, c’est non parce que le peuple américain était contre la poursuite d’expérience que suite au décès du Président, peu de semaines après sa prestation de serment et la poursuite de son mandat par un vice-président peu expérimenté. Roosevelt avait en effet caché sa maladie et se déplaçait sur un fauteuil roulant. C’est le cas que vit l’Algérie d’Abdelaziz Bouteflika avec la proposition de limitation des mandats qu’envisage le président malade. Le Congo qui a, à sa tête, un président encore à la fleur de l’âge - sans doute le plus jeune au monde - est-il dans ce cas d’école? Au peuple de la Majorité présidentielle d’en décider lors d’une assemblée à convoquer sur le modèle «Nous, peuple congolais souverain, nous voulons Kabila...!» et de s’assumer pleinement. Pour cela, la majorité présidentielle n’aura égorger aucun Congolais. Elle aura fait recours à sa liberté de parole.
Et sauf si cela peut échapper à ce journal, contrairement à ce qui peut être déclaré abusivement, à ce jour, il n’y a eu, en l’espèce, de prise de position officielle d’aucune institution de la République: ni le Gouvernement, ni l’Assemblée nationale, ni le Sénat. Encore moins du premier concerné, Joseph Kabila Kabange. A la dernière rencontre de Kingakati, le 20 mars 2014, il avait appelé ses troupes à se mettre au travail en vue de réaliser les promesses électorales en leur demandant de ne guère prêter le flanc à ce débat sur la Présidentielle à venir. Et Ce journal écrivait:
«Sans discipline, c’est le chaos. Sans cohésion, l’adversaire n’aura rien à faire sinon à croiser les jambes, à attendre en se léchant les babines que vienne l’épuisement avant de nous prendre.
La finalité de la cohésion? La stabilité de la famille, la stabilité du pays acquise à prix d’or - le pays ne sort-il pas de la guerre? Une stabilité à maintenir quoi qu’il en coûte! Démocratie? Bien sûr que oui et c’est pour cela que notre République se nomme «Démocratique». Mais entre démocratie et stabilité, que choisir? Que celui qui n’a pas la réponse lève le doigt. La paix restaurée doit être désormais rendue irréversible. Pour cela, la priorité absolue est à la défense nationale, donc à la sécurité du territoire, mais aussi à la diplomatie, à l’éveil des consciences de nos Concitoyens. «Réveillez-vous», lance martial le Chef de l’Etat en commandant en Chef des forces. C’est trois fois que cette phrase est prononcée dans ce discours d’une heure. On a compris… Nul ici n’a comploté contre qui que ce soit. Les comploteurs, ce n’est pas nous... Ce n’est certainement pas le moment de nous laisser distraire. Comme cette «agitation autour de 2016». Partout ailleurs (où il y a aussi des échéances), aucun débat de ce type n’a lieu! Alors, pourquoi a-t-il lieu ici? En prévision de ce 2016, chacun se constitue un clan. Il faut éviter qu’on vienne nous injecter le venin de la division qui nous imploserait. Face à nous, il y a 2014, une année pleine et entière. Puis 2015, une année pleine et entière. Puis 2016, une année pleine et entière. Nous devons mettre à profit ce temps à construire le pays. Puis le dauphin. Tiens le dauphin! «Je n’en ai pas! Et je n’en connais pas», tranche-t-il, sans appel ici comme sur d’autres sujets.
Alors, bien sûr, on lui prête des intentions. «Comme d’habitude». Mais qu’on se rassure: rien ne se fera jamais contre la Constitution et rien ne se fera en violation de la Constitution. Ce n’est pas sans rappeler que la politique n’est pas faite que pour le politicien. Elle est aussi faite pour le peuple. En effet.
«Le peuple a aussi son mot à dire dans la conduite des affaires».
Qu’on se rassure: Kabila ne trahira jamais. Je ne trahirai jamais. Ni la Constitution, ni les troupes. Un jour, quelqu’un a dit, non loin d’ici: «Comprenez mon émotion» (allusion à Mobutu Sese Seko, rires sous la tente) avant de laisser errer les siens et d’abandonner d’autres en rase-motte. Message clair: il y a quelqu’un à la barre. La barre est tenue. Aujourd’hui et demain.
Ce pays a-t-il jamais atteint le point de non-retour, le seuil fatidique, le point, selon le dictionnaire, à partir duquel un événement ou une action en cours ne peut plus être arrêtée ou à partir duquel il devient impossible de revenir sur une décision? Le point d’irréversibilité au-delà duquel la résilience devient impossible. Qui répondra par l’affirmative? Message clair... En France, combien de fois la Constitution de la Vème République - dite du 4 octobre 1958 - a-t-elle été révisée. Dès les premières années de son fonctionnement déjà. Puis, les révisions sont devenues plus fréquentes sous une double impulsion: volonté de moderniser les institutions, impératifs de construction de l’Europe et de l’intégration à l’ordre juridique international. A Kingakati, c’est un Kabila magistral, sûr de son fait et de sa mission, qui a revisité la ligne de front, l’a recadré pour les combats impitoyables qui s’annoncent (Le Soft International n°1273, 1ère éd. datée lundi 24 mars 2014).
D. DADEI.


Related Posts

About author

Portrait de yves