Président covido-septique, Magufuli meurt du Covid-19
  • jeu, 18/03/2021 - 11:51

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1521|JEUDI 18 MARS 2021.

Le président tanzanien est mort mercredi 17 mars, à l’âge de 61 ans, a annoncé la vice-présidente Samia Suluhu Hassan, à la télévision nationale. John Magufuli, président covido-sceptique, n’avait pas été vu en public depuis fin février.

Il est décédé de problèmes cardiaques après plus de deux semaines d’absence inexpliquée du chef de l’État. «C’est avec grand regret que je vous informe qu’aujourd’hui, le 17 mars 2021, à 18h, nous avons perdu notre courageux leader, le président de la Tanzanie, John Pombe Magufuli», a déclaré Samia Suluhu Hassan.

Depuis quelques semaines, des rumeurs circulaient sur les réseaux sociaux, le disant malade ou atteint du Covid-19 et l’opposition demandait des explications aux autorités. Mais elles avaient été démenties par plusieurs membres du gouvernement. Le ministre des Affaires constitutionnelles avait même menacé de poursuites toute personnes qui relaierait les rumeurs sur la santé du chef de l’Etat et des arrestations avaient même été opérées ces derniers jours.

Alors que le président n’avait pas été vu, l’opposant John John Mnyika, secrétaire général du parti Chadema, demandaiy des comptes aux dirigeants. «Nous exigeons un communiqué ». Magufuli était en tournée à Dar Es Salam fin février. Mais depuis, le très croyant président n’était pas réapparu, même pas à la messe du dimanche.

Plusieurs personnes expliquaient qu’il aurait été admis dans un hôpital de Nairobi. Une source émet l’hypothèse d’un possible contrôle de son pacemaker. Mais la presse kényane - le Daily Nation - sans le nommer, avait donné des indices faisant penser à John Magufuli.

L’opposant Tundu Lissu : «Triste de voir qu’il a dû se rendre au Kenya afin de prouver que les remèdes qu’il a vantés ne protègent pas » du Covid-19, avait commenté l’ancien candidat à la présidentielle.

Une ironie cinglante alors que, comme feu le président burundais Pierre Nkurunziza, il avait constamment minimisé l’épidémie, ignoré les mesures d’hygiène, affirmé que le virus avait été vaincu grâce aux prières, qu’il pouvait être éradiqué à l’aide de bains de vapeur et d’herbes médicinales.

Il y a trois semaines, il avait assoupli sa position après la mort le même jour de son secrétaire et du premier vice-président de Zanzibar, demandant aux Tanzaniens de porter des masques.

TESTS À DES ANIMAUX.
La gestion un peu spéciale de la pandémie en Tanzanie avait mis le pays sous les projecteurs mondiaux alors que John Magufuli était à la recherche d’un second mandat. Lorsque le Covid-19 est arrivé en Tanzanie, le président ne comprenait pas les gens qui restent chez eux. Il voulait qu’ils se rendent dans les églises et les mosquées pour prier.

«Le coronavirus, qui est un diable, ne peut pas survivre dans le corps du Christ... Il brûlera instantanément», prêchait-il, en pieux chrétien, le 22 mars depuis l’autel d’une église de la capitale tanzanienne, Dodoma. Il critiquera plus tard la distanciation sociale et le port du masque.

Il mettra en doute l’efficacité des tests. Il fait faire des tests de coronavirus à des animaux et des fruits, annonce qu’une papaye, une caille et une chèvre sont positifs au coronavirus. Il explique ensuite qu’il ne peut accepter de sacrifier l’économie et critique les pays voisins qui l’ont fait.

John Magufuli était le cinquième président de la Tanzanie depuis son indépendance en 1961. John Magufuli, 56 ans, est élu président pour la première fois en octobre 2015, avec 58% des voix. Il succède alors à Jakaya Kikwete. Son parti, le Chama cha Mapinduzi (CCM), au pouvoir depuis l’indépendance du pays, l’a choisi pour le représenter parmi plus d’une trentaine de candidats.

Avant d’accéder à la magistrature suprême, John Magufuli, issu d’une famille modeste, et diplômé de chimie, est plusieurs fois ministre, à partir du début des années 2000. Il se voit notamment confier les portefeuilles de l’élevage et de la pêche, du logement ou encore des travaux publics.

Il est surnommé « tinga tinga», « bulldozer » en swahili, en référence aux programmes de construction qu’il met en oeuvre. En tant que chef de l’État, il promet de lutter contre la corruption, de développer le pays et son économie et lance de grands travaux.

Mais rapidement, les défenseurs des droits humains dénoncent une dérive autoritaire du président. Ils soulignent les difficultés rencontrées par les opposants, puis par la presse ainsi que la réduction des libertés individuelles.
John Magufuli est réélu en octobre dernier, lors d’un scrutin contesté, avec plus de 84% des voix. Magufuli semblait être le genre de personne dont la Tanzanie avait besoin - un président efficace et incorruptible.

Ses actions axées sur les résultats sont jugées comme applicables à d’autres pays africains - une dose de ce dont le continent a besoin pour faire face à ses problèmes de gouvernance. Dès le premier jour de sa présidence, il envoie un message soulignant qu’il ne tolérerait pas l’absentéisme chronique dans la fonction publique.

Une déclaration faite après une visite dans les bureaux du ministère des Finances pour constater les absences et les retards. Il purge la masse salariale publique de milliers de «travailleurs fantômes», des employés essentiellement inexistants - et renvoie de la fonction publique des fonctionnaires considérés comme corrompus ou pas performants. Parfois, cela se faisait même en direct à la télévision.
avec AGENCES.


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