- lun, 05/11/2012 - 07:23
La Majorité serait mal conseillée de s’autodétruire. Au sein de la Majorité, les frus-trations sont réelles. Elles sont compréhensibles. Elles ne datent pas d’aujourd’hui. Chacun en a eu sa dose plus ou moins justifiée. De là à organiser une disparition collective, il n’y a qu’un fou pour oser franchir le Rubicon...
LE SOFT INTERNATIONAL N° 1198 DATE LUNDI 5 SEPTEMBRE 2012
Malgré des douleurs d’enfantement, elle roulait sa bosse. Elle avait su dans le passé régler en interne et avec succès les problèmes auxquels elle avait eu à faire face. Nombre de ces problèmes étaient congénitaux.
Parmi ceux-ci, on pouvait noter:
- La gestion de la ressource humaine - le casting n’était pas toujours approprié; trop de talents laissés sur la route;
on reprenait les mêmes et on recommençait.
Ne pas se renouveler est la meilleure façon de filer droit à sa perte... - Les croc-en-jambe qui, aux Législatives de 2011, avaient atteint la cote d’alerte et déteint la famille.
La fureur de vaincre et de gagner seul coûte que coûte avait poussé à d’outranciers tripatouillages qui ont affecté et fait déconsidérer notre système électoral à ce point qu’on en est venu à s’interroger sur sa justification politique.
LA QUESTION CORNELIENNE.
Ceux des candidats qui, au soir des élections, avaient fait le deuil de leurs ambitions, se retrouvaient un mois plus tard, à l’annonce des résultats, sur les listes des élus d’une commission électorale littéralement déjugée.
C’est en invoquant ces résultats que des acteurs politiques allaient se mettre en scène pour se faire valoir et réclamer des postes dans l’Exécutif national...
Faisant montre de maîtrise de la sphère politique autant que des questions auxquelles le pays avait désormais à affronter s’il voulait survivre à un contexte politique et économique d’exception, c’est à d’autres paramètres que le Président de la République Joseph Kabila et le formateur constitutionnel, le Premier ministre Matata, avaient fait appel pour constituer les équipes.
La question cornélienne qui s’était posée était de savoir s’il fallait poursuivre avec le régime de cooptation des chefs de file - des méchants appellent cela le régime de donation - auquel s’était déjà opposé en son temps le Premier ministre Antoine Gizenga dans la formation de son cabinet en prenant d’office les touts puissants présidents de partis politiques même relativement contestés par leurs bases ou publiquement raillés par la Nation - le cas au meeting présidentiel de début de campagne à Kindu - en plombant ce système ou, au contraire, recruter à l’intérieur de partis de la majorité aussi bien que de l’opposition une ressource intellectuelle nouvelle - une herbe nouvelle -, peu compromise, quitte à la mixer avec l’une ou l’autre personnalité populaire de haute technicité et de plein ancrage local pour composer l’équipe de l’Exécutif national et la faire accepter par les partenaires occidentaux traditionnels qui décernent les certificats de vie ou de décès de nos régimes.
La réponse était évidente.
La suite est venue aussitôt: les résultats économiques engrangés annonciateurs de redressement politique et de respect diplomatique.
Signe: l’accueil soigné auquel le Premier ministre Matata a eu droit lors de son récent séjour en Belgique et en Allemagne, signe d’accès à un nouveau statut de notre pays auprès de ses partenaires traditionnels qui induit plus de respectabilité.
Soit tout sauf pour plaire à des individus aux agendas personnels avérés qui vont à l’aveuglette pilonner un Exécutif désormais mis sous pression et qui n’a guère eu droit à un état de grâce...
Nos pires ennemis ont toujours été nos propres frères...
L’EFFET DOMINO.
Les membres du Gou,vernement de la République n’ont eu de cesse de défiler devant les parlementaires.
Si les convocations sont signées par l’opposition, l’opposition ne s’en cache pas: elle agirait pour compte...
Le dernier membre du Gouvernement en date à avoir été secoué est le ministre de la Défense et des Anciens Combattants, Alexandre Luba Ntambo qui faisait face le 18 octobre à une motion de défiance de l’opposition rejetée par 202 votes sur plus de 330 Députés que compte l’Assemblée nationale alors que 164 Députés l’avaient appuyé.
Selon des calculs d’observateurs, nombre de Députés de la Majorité avaient joint leurs voix à celles de l’opposition.
Hormis les migrations des Députés ARC réalisées dans la précédente Législature, ceci est un phénomène nouveau.
Est-ce par effet domino que ce mouvement a atteint les assemblées provinciales du Bas Congo et de la province Orientale? Cet effet domino qui est une réaction en chaîne qui se produit lorsqu’un changement mineur provoque un changement comparable à proximité, susceptible de provoquer un autre changement similaire, puis, au cours d’une séquence linéaire, un incendie...
Au Bas Congo, un candidat - le gouverneur sortant Déo Nkusu Kunzi Bikawa - officiellement investi par la Majorité présidentielle mis en ballottage défavorable par le candidat dissident indépendant Jacques Mbadu Nsitu, s’est payé le luxe de ne pas conserver le total de voix réunies au premier tour et termine la course par 11 voix contre 17 voix raflées par le candidat indépendant. En province Orientale, le camouflet est plus sévère.
Alors que le candidat de la majorité, l’ancien ministre PPRD Jean-Pierre Darwezi Mokombe a été éliminé au premier tour, celui qui s’est déclaré proche de la majorité, à savoir le PDC Jean Elongo Tokole s’est vu refuser les voix de sa propre famille, celles-ci ayant été portées en masse sur le nom du candidat indépendant Jean Bamanisa Saidi proche néanmoins du MSR, parti allié de la majorité.
Elongo perd la course avec 45 voix contre 48 pour son adversaire indépendant qui n’avait réuni que 27 voix au premier tour.
Que les voix de la majorité se soient portées aussi massivement sur un candidat autre que celui de la majorité est signe soit du rejet d’un homme - le sempiternel problème de casting -, soit du refus d’obéir aux mots d’ordre venus de Kinshasa - ce qui n’a pas d’autre mot qu’une rébellion.
Les médias ne se sont pas trompés, le message est sans équivoque.
Tirons-en deux enseignements.
- Que ce soit en province Orientale ou au Bas Congo, ce sont des candidats loin des états-majors, injustement victimisés, mais qui sont restés proches des leurs bases, qui l’ont emporté sur des hommes d’appareils. Les différentes études kinoises de l’Institut les Points ne se sont pas trompées.
- Le deuxième enseignement est que très clairement, une province - la province Orientale - vient de basculer et de rejoindre pour l’instant le groupe des provinces frondeuses en s’affichant comme telle.
Ce fut le cas des provinces de l’Equateur et, désormais, du Bas-Zaïre. Or, avec le Katanga et le Bandundu, la province Orientale était identifiée du fait de la démographie, comme la province clé, la province pivot, une «Swing State», la province sans laquelle on ne peut une élection.Sans anticiper sur ce qui pourrait arriver demain, il est clair que pour la majorité présidentielle, deux provinces restent désormais à l’agenda: le Katanga à l’Est, le Bandundu à Ouest. - Face à l’incompréhensible de la situation, il reste à dire son ahurissement.
Même si la politique n’est jamais un long fleuve tranquille, qu’est-ce qui explique que la majorité se tire elle-même un coup à la jambe et s’autodétruise? Sauf à jouer à se faire peur, il est temps qu’on comprenne que le feu qui prend dans un coin d’immeuble peut se transformer en un incendie qui peut tout consumer...
Y a qu’un fou pour envisager cela.
Faudra surveiller faits et gestes de vieux loups au débat qui débute cette semaine à la Chambre basse avec la présentation par le Premier ministre de la loi des Finances 2013.
D. DADEI