- lun, 28/02/2022 - 14:17
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1547|LUNDI 28 FÉVRIER 2022.
Argent et foot font-ils élire un Président de la République? Au Liberia, une star du foot mondial, George Weah, a mordu la poussière deux fois. Et la troisième certes a été la bonne. Mais si les calculs du G-7 qui n’en est pas à son premier candidat se révélaient faux?
Au départ ce fut son demi frère - multi-millionnaire, en $US - qui fut nominé candidat Président de la République. Au dialogue inter-congolais - Addis-Abeba, Gaborone, Sun City, Pretoria - Raphaël Soriano Katebe Katoto se laissa convaincre qu’il serait le prochain Président de la République Démocratique du Congo!
Il fut montre de générosité extrême, distribua des paquets de $US autour de lui, fit venir opposants internes et externes, les prit en charge. A la tête d’aucun parti politique, il ne sut jamais se regarder dans le miroir sans y voir le Président du Congo.
Dans son sillage apparut dans ses appartements du luxueux The Palace à Sun City Moïse Katumbi Chapwe à peine visible. On le présente basé en Zambie, proche de l’ancien président Frederic Chiluba aujourd’hui en difficulté, recherché et réclamé plus tard par Levy Mwanawassa et Rapiah Banda, les successeurs de son mentor.
C’est Joseph Kabila Kabange, à son avènement à la tête de la magistrature suprême, qui le fait créditer au Congo, conseillé dit-on par l’ex-gouverneur du Katanga des années Mzee, l’ambassadeur Augustin Katumba Mwanke, le puissant homme du sérail présidentiel. C’est Kabila qui le fait revenir au Congo, le pousse à la politique, accepte qu’il prenne la tête de la riche province minière du Katanga au lendemain des élections de 2006 où il fut élu à la fois député national et provincial.
C’est l’époque du grand amour entre Kabila et Katumbi conforté par le lien Katumba Mwanke. Depuis, il a fait fortune dans les mines. Est devenu multi-miilionnaire, en $US...!
Allié de la rébellion pro-rwandaise du RCD-Goma, puis de l’UDPS dans le cadre de l’ASD, l'Alliance pour la Sauvegarde du Dialogue Inter-congolais dont il est l’un des vice-présidents - épisode pendant lequel il est lâché par sa colonie d’amis en tête Joseph Olengha Nkoy qui le traite à Pretoria d’«analphabète politique» - Katebe a repris le chemin de son exil belge - dans sa ville flamande de Brugges où il vit dans une propriété à perte de vue avec cerfs, terrains de tennis et de golf.
LA JUNGLE CONGOLAISE.
Il fait une apparition rapide dans la Capitale Kinshasa couvert et protégé par l’autre proche du sérail présidentiel, le professeur Guillaume Samba Kaputo mais ne peut rester plus longtemps. Katebe est recherché par la justice congolaise, depuis les années Mobutu, cité dans une affaire de meurtre d’un ressortissant grec qui aurait eu une histoire avec sa femme…
Les Congolais ont revu ce richissime homme d’affaires qui fit sa fortune dans une entreprise frigorifique. Il fournit du poisson du lac Moero à la frontière congolo-zambienne, aux agents de la compagnie minière Gécamines. Celui qui porte les paniers de cette pêche industrielle : le demi frère Moïse Katumbi Chapwe, né de père juif italien... Comme dans le dessin animé Le Roi Lion de Walt Disney, c’est désormais lui - Simba, fils du Roi Mufasa - qui est présenté à la jungle congolaise.
Avant lui, deux autres avaient été présentés, tous deux anciens gouverneurs de la Banque Centrale : un Sud-Kivutien Pierre Pay Pay wa Syakassighe, huit ans de Banque Centrale, un multi-millionnaire en $US et un Katangais - un Mulubakat proche des Kabila : Jean-Claude Masangu Mulongo, douze ans de Banque Centrale, un multi-millionnaire en $US. Trouvez l’erreur…
Pour crédibiliser la candidature de Masangu, ils rassemblent une dream team autour de lui. Même modus operandi. Au lendemain des élections de 2011, des réunions se tiennent jour et nuit en vue de la prise du pouvoir.
Le noyau dur qui forme l’actuel G7 est là : Christophe Lutundula Pen'Apala, José Endundo Bononge JEB, Olivier Kamitatu Etsu OKE et, surtout, Pierre Lumbi Okongo, conseiller spécial du Président de la République qui a un œuf à peler avec l’homme du sérail qui pèse : l’ambassadeur Katumba Mwanke qui a réussi le tour de force là où personne n’avait jamais réussi : le descendre de son piédestal au tout puissant ministère des ITPR (Infrastructures, Travaux publics et Reconstruction) où il mijotait son modèle sud-coréen de reconstruction d’une Nation. Pour cela, il lui fallut du financement. Les Chinois étaient prêts.
C’est l’époque du fameux troc: argent contre mines… Si les contrats chinois sont signés, Lumbi est écarté à l’arrivée ! Dribblé, grogne-t-il. Il ne se souvient pas comment il a trouvé ce parachute de poste de conseiller spécial - un simple membre de Cabinet à la Présidence de la République, explique-t-il. Tout sauf une entité constitutionnelle.
Aux côtés de Kabila, Lumbi ne sera pas le Seti des années Mobutu. A peine s’il rencontre le Chef de l’État. Qu’importe! Avec un peu de doigté, il pourrait jouer sa partition. Au coin de rue, il y a toujours du Libanais ou du Grec peu scrupuleux ! Qu’il tombe dans ses filets, il y en aura pour l’escarcelle…
C’est ainsi que Lumbi survit. Venu à la politique par la société civile et donc, par les droits de l’homme, ce Conseiller spécial du Chef de l’État en matière de sécurité existe en produisant la peur autour de lui. Si son parti - le MSR, Mouvement social pour le Renouveau - a des élus, il a procédé en réclamant sa part à une CÉNI de Daniel Ngoy Mulunda qui fut tout sauf indépendante…
A Gungu, raconte-t-il, la direction locale de la CÉNI a démissionné, face aux pressions du Premier ministre d’alors qui réclame tous les mandats pour son parti. Informé, Lumbi déboule, menace, joue au justicier puis réclame sa part…
Sinon, danger ! S’il s’en trouve des hommes qui lui obéissent et le suivent, c’est qu’ils soupçonnent ce qu’il est: l’œil et l’oreille du Chef de l’État. Mais Lumbi a un schéma perso. Son propre plan… La vengeance est un plan qui se déguste surgelé…
LE FOOT, RIEN QUE LE FOOT?
Le groupe qui le suit chez Masangu s’est laissé convaincre que ces réunions qui se tiennent journellement sont connues et bénies par le sérail. Rien de tel. Lumbi avait son plan : détruire le parti présidentiel PPRD dont le sien est une des tentacules. Lumbi veut le pouvoir suprême. Il mijote un coup d’État de palais! Plus d’une fois, le sérail s’en lamente.
«Ce MSR, créé dans ces conditions, pour ce but, par Samba Kaputo!…». Qu’importe! Lumbi s’est émancipé. Il faut pouvoir le rattraper. Mais comment?
La politique n’a jamais été un long fleuve tranquille. Elle est jalonnée de coups fourrés. Malhonnête et absence de loyauté et de fidélité ne sont pas politiques ! Vraiment ?
Mi-novembre 2005, sortie officielle de «Triple P», Salon Congo du GHK. Tous sont là dans ce cadre matelassé : le logisticien JEB - José Endundo Bonongo - dans ses œuvres ; peu avant, autour d’un dîner organisé chez Triple P, il a fait déclasser son «ami» de toujours, OKE dans la course à l’investiture. Lumbi à la manœuvre. Christophe Lutundula Apala Pen'Apala hurle, désaffecte séance tenante son Vice-président Biebie qui a signé sans «titre ni droit en lieu et place de lui, le Président».
En réalité, il se murmure qu’il serait dans le ticket de Vital Kamerhe Lwa-Kanyiginyi Nkingi comme 1er Vice-président du Bureau de l’Assemblée Nationale pour le compte du... MSR! Tiens, tiens! Kamitatu mécontent que son alter ego «JEB» l’ai désactivé en lui préférant le multi-mullionnaire en $US sud-kivutien, est inconsolable lui, fort de son carnet d’adresses de partis libéraux, ne peut quitter sa salle de bains sans se voir Président de la République.
Si le vieux «Kwadros» - Cléophas - le cherche dans la salle, il ignore que la veille, OKE a traversé la rue...
Aux côtés de Lambert Mende Omalanga, il a pris ses quartiers avenue Lukusa, à la Gombe, siège de l’AMP, l’œil en permanence rivé sur l’écran d’ordinateur, le doigt continuellement sur le clavier. En bon secrétaire général d’administration publique. Il orchestre des rendez-vous, gère l’agenda - jouant au logisticien, à l’école de JEB -, recrute pour l’Alliance pour la Majorité Présidentielle. Jure de faire gagner son Champion Kabila.
Quelles suites pour P3 ou Triple P?
Dès la sortie du Salon Congo, l’homme peu charismatique, n’a aucune chance de rester dans la campagne. Ses millions en $US ne sont pas visibles. Antipas Mbusa Nyamwisi aujourd’hui au G7 n’a pas rejoint le groupe même si Charles Mwando Nsimba tonne toujours, de sa voix de baryton, dans ce salon. Comme d’habitude.
Le banquier a-t-il compris que ses «Camarades» veulent le précipiter dans un traquenard?
Au meeting de Bukavu, le groupe s’est désintégré.
QUAND L’UDPS LE DEMONTISE.
A son retour à Masimanimba où il tente sans succès de récupérer sa campagne, le «Vieux Kwadros» est inconsolable... «A Bukavu, nous avons été hués», lance-t-il. Puis : «Pierrot n’est pas un politique. Nous nous étions trompés...».
Devant les réalités, «Triple P» a décidé de rendre les armes disant vouloir rallier Kabila. Rendez-vous est pris par un ami. A l’heure du rendez-vous, Triple P tourne casaque. Prétend que «des Présidents de la sous-région le supplient de rejoindre Kabila, signe qu’il ne compte pas pour du beurre». Que veut-il négocier ? Kabila ne négocie jamais. Nul n’a jamais rien su de ce revirement…
Les millions font-ils un Président de la République? Oui. La campagne électorale requiert des moyens (humains et financiers) éreintants. En Afrique, il s’agit surtout d’une vraie machine de combat. Surtout si elle menée à l’américaine. Face à l’homme au pouvoir, le succès n’est jamais au rendez-vous. Mais l’argent ne suffit pas. Il faut un discours, de la surface intellectuelle.
Le foot très populaire au Congo, est-il signe de popularité, un gage de victoire à une Présidentielle dans un si vaste pays, chaque province ayant ses réalités sociologiques. Comment s’imposer dans les quatre ou cinq swing states - les provinces les plus fortes démographiquement?
Au Liberia, face à Mme Ellen Johnson-Sirleaf nobélisée, l’ex-star mondiale du foot George Weah, a mordu la poussière en 2005 une première fois! Autodidacte en politique, il choisit, à la Présidentielle suivante, de jouer au colistier du neveu du 19ème président américano-libérien William Tubman, descendant des esclaves affranchis aux États-Unis qui, en 1847, fondèrent le Libéria.
Là aussi sans la moindre chance face à une Ellen Johnson-Sirleaf qui a levé 13 milliards de $US pour reconstruire son pays! Depuis, Weah se contente d’un strapontin de sénateur libérien. Il a renoncé à ses ambitions démesurées? Certes, il s'est présenté la troisième fois, qui a été la bonne. Si les calculs du G7 se révélaient faux?
D. DADEI.
lundi, 04/04/2016 - 02:03.