- lun, 05/05/2014 - 05:20
Ils étaient à nouveau à l’hémicycle de la Chambre basse vendredi 2 mai. Le ministre de l’Economie et Commerce, Jean-Paul Nemoyato Bagepole et son collègue Tryphon Kin-kiey Mulumba en charge des Postes, Télécommunications et Nouvelles technologies de l’Information et de la Communication venaient répondre aux questions posées le 30 mai par les Députés lors du débat respectivement sur les prix des biens de consommation courante et sur les équipements des sociétés GSM à la base de la basse qualité de leurs services. Ci-après l’intégralité des réponses du ministre Tryphon Kin-kiey Mulumba.
Honorable Président de l’Assemblée Nationale,
L’Hon. Député Jean Baudouin Mayo Mambeke en homme de Droit, tient à la précision, rappelant les membres du Gouvernement à se tenir à la rigueur du Règlement Intérieur. Je vais m’y employer en donnant des réponses précises aux questions précises posées par les Honorables Députés.
J’ai regroupé ces questions en 10 préoccupations.
Préoccupation n°1:
La couverture nationale.
Réponse:
J’ai expliqué que pour des raisons diverses, la télé-densité de notre pays est malheureusement de 22%. La couverture totale ne sera possible que:
w d’une part par le projet de téléphonie rurale que mon Ministère pilote, projet adopté le mardi 22 avril 2014 en Conseil des Ministres présidé par S.E.M le Président de la République, Chef de l’Etat, Joseph Kabila Kabange, qui, grâce à une technologie flexible, à un déploiement facile, fonctionnant à l’énergie solaire, va permettre à nos Concitoyens de l’arrière-pays, des villages et chefferies, d’avoir le téléphone mobile comme leurs compatriotes des villes et de basculer dans la société de l’information et du savoir universel pour prétendre enfin être Citoyens du monde.
w d’autre part, par la mise en place que j’ai initiée, d’un fonds de service universel prévu par la loi, qui permettra à l’Etat de financer le déploiement des réseaux publics et privés dans l’arrière-pays à des prix abordables.
Préoccupation n°2:
L’interconnexion.
Réponse:
J’ai eu à m’étendre sur le sujet en confirmant le caractère obligatoire de l’interconnexion pour tous les opérateurs du Secteur qui selon la loi-cadre des télécommunications, doit passer par le réseau de référence qu’aurait dû implémenter l’opérateur public, à savoir, la SCPT. En vue de faire face à ce manquement grave, nous sommes contraints d’assumer des interconnexions bilatérales entre opérateurs. D’où des séances de négociation et de signature des contrats commerciaux entre opérateurs, chacun recherchant à sauvegarder ses intérêts.
Bien sûr que le refus d’interconnexion est inacceptable mais la loi 014/2002 du 16 octobre 2002, a institué, en l’espèce, le Régulateur comme juge naturel. Le Ministre ne peut intervenir qu’en cas de recours auprès du Ministre d’un opérateur mécontent de l’arbitrage du Régulateur.
Me référant à l’avis du Régulateur évoqué dans ma réponse à la Question Orale, deux procédures - d’une part, d’arbitrage auprès du Régulateur, de l’autre, judiciaire à la demande d’un opérateur contre les autres - ne permettent pas que le Ministre prenne des sanctions.
Préoccupation n°3:
La question de la tarification et de la qualité de service.
Réponse:
La guerre sans merci pour la vie ou la survie que se livrent les opérateurs est telle qu’ils n’hésitent pas à s’entre-déchirer par des moyens licites ou illicites, ni à recourir à des pressions ou des chantages sur les Responsables du pays.
Sur la guerre des prix et les prix planchers, pendant des mois, à leur propre demande verbale ou par courrier, j’ai multiplié des réunions de conciliation - de groupe ou, devant l’impossible de les mettre tous ensemble, chacun d’eux répondant à un centre nerveux installé à l’étranger et lui-même mis sous pression de performance et de résultat, à des réunions interpersonnelles. Mais leurs thèses restaient irréconciliables. Chacun invoquant la même loi, avec la même brillance.
Leurs avoirs leur permettent de s’assurer le service des meilleurs avocats, de s’assurer le contrôle des groupes de pression les plus arrogants dans tous les cénacles, de se payer les campagnes de presse les plus virulentes… Même les tenants des prix planchers en sont arrivés à pratiquer des prix en deçà de ceux contre lesquels ils se sont levés. Quand on leur pose la question, ils répondent: «Nous devons survivre, non!»
Du coup, les uns vous offrent des appels illimités pour 100 unités pour toute la journée - «Kanga Journée». D’autres des tarifs «Benga voisins» à 6 unités. Ou «7 jours de bonus» et voilà qu’on annonce le retour avec fracas de «Allo na Allo», outre «le Triple avantage».
Que faire? Devant garder la neutralité vis-à-vis des parties en ma qualité de juge de second degré, j’ai recouru à la Cour Suprême de Justice faisant fonction de Cour constitutionnelle afin de me faire mon intime conviction. Bien sûr que la Hiérarchie a été informée pleinement et entièrement. Et avant même que je n’aie été notifié de l ‘arrêt de la Cour Suprême de Justice, les opérateurs regroupés - une fois n’est pas coutume - étaient déjà informés et avaient alerté la Terre entière… Quelle vérité cherchent-ils à cacher?
Pour en convaincre les Hon. Députés, le Législateur n’a jamais placé le Ministre dans la position d’exécuter les décisions du Régulation - c’est le contraire. Devant la difficulté où elle s’est trouvée d’appliquer ses propres décisions, j’ai prié l’Autorité de Régulation de me soumettre deux projets d’arrêtés portant sur les sanctions applicables en cas de non-respect par les opérateurs d’appliquer ses décisions. Il est clair que l’absence de barème des sanctions qu’aurait dû proposer au Ministre l’Autorité de Régulation, n’a pas permis de sévir.
Le Ministre des PTNTIC ne frappe pas en envoyant des opérateurs récalcitrants en prison, bien que cela ne soit pas exclu; il expédie des astreintes financières dont le barème n’avait jamais existé puisque jamais proposé au Ministre par le Régulateur dont c’est le métier et qui hésitait entre les formes à prendre: arrêté ministériel ou un décret du Premier Ministre? Et, en période de mesures conservatoires, il faut solliciter une dérogation de Son Excellence Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement. On voit qu’il y a harmonie totale en dépit des pressions inadmissibles exercées sur les équipes de l’Exécutif du pays par des puissances d’argent!
Préoccupation n°4:
Les Licences 3G.
Réponse:
Le prix de la licence 3G a tenu compte des réalités du marché et du souci d’équité entre opérateurs. A mon arrivée au Ministère, mon prédécesseur avait pris l’arrêté fixant le prix convenu - après consultation des opérateurs - et cet arrêté publié, la transaction lancée que j’ai parachevée au nom de la continuité des services de l’Etat, après m’être largement informé, à mon tour.
Mon collègue Thierry Liézin Moungala qui me regarde à Brazzaville et que je rencontre souvent dans nos réunions des Ministres des Télécommunications et NTIC - l’Hon. Henry Thomas Lokondo dont je connais et salue l’extrême professionnalisme pourrait prendre son numéro de téléphone et s’enquérir de la réalité - m’a confirmé avoir vendu la 3G à moins de 15 millions de $, un prix ne dépassant pas les 12 millions quand le Congo a vendu pour un total de 75 millions de dollars. Notre voisin n’a pas vendu une licence à 100 millions de dollars. Peut-être s’agit-il des 100 millions d’une autre monnaie!
Nous devons connaître nos habitudes de communication: c’est en fonction de ça qu’on évalue un marché. La 3G est faite pour les Smartphones et n’a de sens que pour les téléchargements, non pour passer des appels-voix ou lancer des bip. J’ai appris en visitant Airtel - c’est là que ces rencontres ont un sens - que le parc-abonnés du Gabon fort de 1 million d’abonnés finance celui de la RDC qui pèse 9 millions d’abonnés. L’attrait d’un marché se trouve non pas dans le nombre d’abonnés mais dans la qualité de la communication… Combien un Congolais de RDC dépense-t-il par jour en consommation de communication, et combien un Gabonais, combien un Egyptien? Voilà qui permet de placer le prix d’une licence…
Quant au Libanais de NBC qui a acquis une licence à 20.000 dollars, d’une part, les faits remontent au régime du 1+4, d’autre part, le Régulateur - dont à nouveau c’est le travail - a proposé la migration de NBC vers d’autres bandes, la plage dans laquelle il veut évoluer étant mondialement celle réservée à la 3G. A nouveau, il revient à l’ARPTC de se faire obéir ou de me proposer des sanctions. En Afrique du Sud, les deux plus gros opérateurs MTN et Vodacom ont traîné devant un juge le Régulateur et cela fait du bruit.
Préoccupation n°5:
Les perturbations dans les Kivu par les pays voisins.
Réponse:
Je prends bonne note de cette question de l’Hon. Muderwa déjà sur ma table. A nouveau, ce problème de perturbations par des réseaux des pays voisins est du ressort du Régulateur mais je m’engage devant la Représentation Nationale, de demander au Régulateur, conformément aux recommandations de l’Union Internationale des Télécommunications, UIT - dont nous sommes membres et qui gère à travers la planète les fréquences - recommandations relatives au rayonnement des fréquences radioélectriques, d’entamer le processus de normalisation avec les pays voisins concernés.
Ce problème fut déjà posé à l’époque avec nos voisins du Congo Brazzaville et de la Centrafrique.
Préoccupation n°6:
Le téléphone mobile et la santé, question chère à l’Hon. Didace Pembe.
Réponse:
Nombre d’études ont été réalisées en l’espèce au cours des deux dernières décennies pour déterminer si l’usage du téléphone portable représente un risque potentiel pour notre santé, spécialement pour le cœur. Sans être spécialiste, à ce jour, il n’a encore jamais été établi de façon indiscutable que le téléphone portable puisse être à l’origine d’un effet nocif pour la santé humaine mais c’est vrai nous devons veiller au principe de précaution en réduisant ces antennes qui abîment notre environnement par la mutualisation au lieu de voir tous ces champignons émerger sur un même site - tel à Binza Pigeon - chaque réseau a déployé ses antennes.
Je sais qu’aucun projet n’est plus désormais lancé sans mener des études environnementales au niveau des experts de plusieurs ministères, dont celui qui en charge l’Environnement. C’est le type de questions transversales.
Préoccupation n°7:
Les recommandations du Sénat.
Réponse:
A la suite du rapport de l’enquête du Sénat qui a mis a nu plusieurs défaillances des opérateurs de téléphonie mobile, un Document de Politique Sectoriel a été élaboré et a servi de termes de référence à la rédaction du nouveau Cadre légal en examen dans des Commissions gouvernementales.
Par ailleurs, la faille majeure concernant les appels internationaux a amené le Gouvernement à signer le contrat avec le consortium Agilis-Entreprise Télécoms plutôt que d’activer l’ARPTC dépourvue de moyens.
La campagne de traque des SIM BOX qui a rapporté au Trésor public 12 millions de dollars/an, bénéficie de l’expertise technique du Consortium et implique plusieurs services de l’Etat: Renseignements, Police, Justice, armée.
Mon Ministère se limite au seul travail technique et la suite de la procédure n’entre nullement dans ses prérogatives. En clair, je n’ai mis aucun compatriote en prison, ni libéré ou fait libérer aucun expatrié.
Préoccupation n°8:
Les recommandations de certains Députés.
Réponse:
La recommandation sur le transfert indirect des capitaux me paraît pertinente. J‘en prends bonne note. Quant à celle des données informatiques sous-traitées en Inde, il s’agit d’une question transversale que je vais porter à la connaissance d’autres collègues Ministres.
Préoccupation n°9:
La carte SIM à 50 $.
Réponse:
S’agissant de la carte SIM, mon Ministère a initié une réflexion après la campagne de lutte contre la fraude du trafic international entrant matérialisé par la prolifération des cartes SIM non identifiées. La réflexion s’est étendue à la recherche des recettes innovantes. La faiblesse récurrente du Budget de l’Etat a été largement décriée, aussi bien par le Président de la République que par le Parlement.
Il est surprenant qu’une réflexion interne en laboratoire et, à la limite sans intérêt, menée au sein d’une structure de l’Etat à savoir ECOFIRE, se retrouve dans la rue et fasse l’objet de spéculations et de manipulations à une telle échelle. Il se pose un problème d’éthique qui a amené tout le Gouvernement à s’émouvoir, et son Excellence Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, à instruire Madame la Ministre de la Justice à faire ouvrir une enquête judiciaire par le Procureur Général de la République.
Il est vrai que si un document a été soustrait de nos administrations et utilisé à d’autres fins, cela relève de la criminalité contre laquelle il faut se lever. Regardons ce qui se passe ailleurs et ne soyons pas l’exception du monde… Comme avocat de 1ère force, l’Hon. Mayo ne me contredira pas! Mais, heureusement, il ne s’agit que d’une mauvaise copie volée, que ceux qui commandité cette subtilisation auraient mieux fait de faire authentifier et ne les grandit nullement.
Un Gouvernement fonctionne comme un think tank où diverses idées doivent pouvoir germer, naître, faire du chemin ou se briser. C’est comme ça que fonctionne le monde. C’est comme ça qu’évolue le monde. Sinon, on aurait jamais rien inventé sauf, peut-être, le fil à couper le beurre. A nouveau, il est clair qu’il n’a jamais été question, à mon Ministère, ni au niveau du Gouvernement, d’envisager de vendre une carte SIM à 50 dollars. Le jour où je serai convaincu de mettre un prix sur la carte SIM - comme cela se passe ailleurs -, je viendrai avec cette proposition motivée, en débat public ici, avec un projet de loi, au Parlement, et, bien sûr, je le défendrai. D’où le démenti cinglant de mon cabinet et l’action que l’Office du Procureur Général de la République va ouvrir, après la plainte du Gouvernement pour déterminer l’auteur ou les auteurs de cette subtilisation qui a fait l’objet de pamphlets, pour tenter de bloquer la marche des idées pour des raisons que l’on imagine. Au journaliste d’une agence onusienne Okapi qui prétendait détenir une copie de ce document subtilisé et lui remis par qui on peut imaginer et qui m’appelait pour entendre ma réaction, à qui j’ai dit clairement qu’il disposait certainement d’une mauvaise copie, le voilà ce journaliste qui accomplit son exploit sans au minimum se rappeler qu’il m’avait téléphoné et que j’avais démenti l’existence de ce document ou de la version qu’il détenait. Est-ce du journalisme ça ou de la politique? Quand on fait usage public d’un faux, est-ce de l’information ou de la malfaisance? Est-ce servir pleinement la démocratie à l’heure précisément des dangers de toutes les manipulations graphiques que permettent les NTIC avec la cybercriminalité? Si on doit mettre les réunions des cabinets ministériels sur écoute et entendre tout ce qui s’y dit, même de peu d’intérêt, où serions-nous?
Préoccupation n°10 enfin:
Les plaidoyers sur les retombées de services postaux et des télécommunications sur ma circonscription électorale de Masimanimba, du Kwilu, du Bandundu et le travail des jeunes.
Réponse:
Hon. Présidenr,
ce n’est pas un mystère, les TIC sont vecteurs de croissance et créateurs d’emplois directs et indirects, dont spécialement dans les milieux des jeunes. Les retombées des infrastructures à fibre optique que le Gouvernement s’attèle à implémenter, par lui-même via des emprunts ou par des privés - la phase 1, la phase 2, la phase 3, les différentes redondances dont celle aérienne Inga-Katanga sur le réseau SNEL ou celle de Liquid Télécom au Katanga, une infrastructure mutualisée dans la Capitale - seront ressenties à terme. Nous ne sommes qu’au début. L’implantation de la fibre optique a permis aux pays de la SADEC, au Zimbabwe particulièrement de faire passer de 1 à 3 l’indice de développement humain. Je ne vois aucune raison que ce qui a marché ailleurs, ne marche pas chez nous.
Quant à la question sur la poste posée par l’Hon. Puela et qui ne faisait pas partie du sujet mais si l’Hon. Président autorise que je réponde malgré tout, je dirais qu’à l’initiative de mon Ministère, le Gouvernement a doté le pays pour la toute première fois, d’un document de politique sectorielle. La population de Masimanimba, du Kwilu, du Bandundu et du Congo, bénéficiera des résultats de cette réforme.
Mais puisque j’ai la chance de parler parfaitement la langue Kikongo, en tout cas mieux que mon ami l’Hon. Puela, permettez-moi, Hon. Président, de dire quatre phrases dans cette langue de chez nous:
«Baleke, ba Maman, ba Ngwashi, muntu kuguna beno ve! Bitumba ya campagne électorale yo me banda ntete ve. Kisalu yina me banda ve. Bo yantika yo ve avant l’heure! Kisalu yayi ya politique ya beno ti Tata Nzambi me pesa beto, yo kele bonso Nfinda. Nge Mama, ti bana, beno me bika kutula masa na tiya. Beno ke kinga Bakala, Papa, Ngwashi kwendaka na Nfinda yanti vutuka ne bwala ti Gabuluku ou Ngwadi. Kasi Nfinda yina me fuluka bi gonsa kisaka saka: Ba Ngo, ba Bibogu, ba Nyoka yo lenda kumina mono. Mono mpi mono lenda kubwa na diba. Mu bukana! Ah… Masa na tiya keti yo me kulumuka na nzungu, beno yika ya nkaka. Nzambi kele, malgré bi gonsa kisakasaka, mi ya gwisa gu Mayumbu! Ami ngiena Ya Kala. Logwena Gio? Mudu akondji gunufuda! Ya Mungul tubaka: beto yonso beto kela bana ya 1900. Oyo akobangisa muninga aza te! Logwena Gio?»
Honorable Président de l’Assemblée Nationale,
En vous remerciant vous-même particulièrement pour m’avoir permis de fournir à la Représentation Nationale ce qui est avant tout une série d’informations objectives qui auraient pu faire défaut à la connaissance de la Nation, j’espère avoir rencontré parfaitement les préoccupations des Honorables Députés auxquels je tiens à réitérer mes plus sincères remerciements.
Fait à Kinshasa, le 2 mai 2013.
Tryphon Kin-kiey Mulumba,
Ministre des Postes, Télécommunications et Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication.