- dim, 23/05/2021 - 17:09
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1527|DIMANCHE 23 MAI 2021.
Lonzo Natural Ressources, LNR Sarl, Mabo-Kit Sarl, Agri Kwango Sarl, Agrik Sarl, Jivento Group Sarl, Feed Africa Sarl. Celle-ci enregistrée sous CD/KIN/RCCM/14-B-2683, id. nat. 01-000-N83155Z avec siège, avenue Kabasele Tshamala, ex-Flambeau, au n° 8225, immeuble Modern Paradise, 1er étage, bureau MBM Conseil, commune de la Gombe, est curieusement associée à la fameuse société sud-africaine c qui créa une autre Africom Commodities DRC Sarl représentée par un même homme, le SudAf Christo Grobler outre Agri-Kwango Sarl dont la gérante est Mme Betty Mayala Mabumbi, cette même dame étant gérante de la société Mabo-Kit Sarl. Betty Mayala Mabumbi, la femme de Patrice Kitebi Kibol Mvul, à l’époque des faits, ministre délégué aux Finances.
« C’est sa femme, je le sais. J’ai longtemps travaillé avec lui », reconnaît Joseph Kitangala Kabala, «un lanceur d’alerte qui dénonce la gestion de Kitebi qui dirige aujourd’hui le Fonds de promotion de l’industrie», écrit une enquête de Rfi mise en ligne samedi 22 mai.
Autre piste : le fait que la société Feed Africa Sarl et Jinvento Group Sarl sont deux entreprises représentées par un même homme, Me Gérard Mosolo.
Les pistes s’accumulent : la société LNR Sarl (Lonzo Natural) qui appartient à l’ex-ministre délégué aux Finances près le Premier ministre, Patrice Kitebi Kibol Mvul, est logée à la même enseigne que Feed Africa Sarl Ressources, à savoir, avenue Kabasele Tshamala, ex-Flambeau, au n° 8225, immeuble Modern Paradise, 1er étage, bureau MBM Conseil, commune de la Gombe.
«ÇA PEUT HEURTER QUELQUES REGLES».
Si les deux sociétés sud-africaines partenaires au sein de Feed Africa Sarl à savoir M-Power Group (Pty) Ltd, 635, Makou Street Monument Park, Pretoria 0181, RSA et Michigan Farming (close corporation), Dr Beyers Nandestraat 43, Lichtenburg, RSA, disposent chacune de 15 parts au sein Feed Africa Sarl, soit un total de 30 parts, soit 600 US$, un nommé Édouard Matata Shwiti-Lya Mbemba - un parent du Premier ministre - et Mme Hortense Kachoko Mbonda - la partenaire conjugale du Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon - ont chacun plus du double des parts des premiers soit 35 parts en ayant déboursé chacun 700 US$, soit un total de 1400 US$. Epouse Kitebi, épouse Matata ?
Affaire des familles... Le capital social de Feed Africa Sarl est de 2000 US$. En clair, aucun risque.
Or, selon des témoins, lorsque le 9 mai 2012, le ministre des Finances Matata traverse le boulevard du 30-Juin et devient Premier ministre, il met tout son poids pour que le ministère qu’il a dirigé du 19 février 2010 au 18 avril 2012, n’ait pas à sa tête un ministre de plein exercice mais un simple délégué auprès du Premier ministre et désigne à ce poste son homme de main, un servile exécutant des ordres, Patrice Kitebi Kibol Mvul, ce qui ne rend pas celui-ci moins responsable devant le parquet.
En allant à la Primature, le ministère des Finances a été mis sous tutelle du Premier ministre. C’est à cette époque que sont lancés tous les grands projets économiques de la mandature Kabila après les élections contestées du 28 novembre 2011.
C’est le cas de l’immeuble dit Intelligent, des sociétés TransCo, Congo Airways, de l’aérogare modulaire internationale de N’Djili, du projet d’acquisition des locomotives de la SNCC, du lancement du projet fibre optique dont les contrats furent signés du temps du ministère des Finances et qu’il va gérer directement à la Primature au grand dam du comité de gestion de la société historique des télécommunications SCPT.
Il en va des fonds générés par l’exploitation de la fibre optique par les entreprises cellulaires logés sur un compte dont le seul centre d’ordonnancement est le Premier ministre lui-même.
Dans le cadre du projet Bukanga Lonzo, témoignent des proches du dossier, documents à l’appui, les millions de US$ ordonnés par le duo Kitebi-Matata via la Banque Centrale du Congo sont intégralement versés à la société sud-africaine Africom Commodities (Pyt) Ltd via la banque sud-africaine Standard Bank.
De ces millions de US$, 20% vont à l’achat des matériels destinés au projet du parc agro-industriel et 80% (oui vous avez bien lu 80% de ces millions de US$) sont redirigés vers la société congolaise Feed Africa Sarl dont le compte bancaire est logé à la banque Standard.
A quoi servent ces millions de US$ versés à la société Feed Africa, elle qui n’a aucun lien avec Africom Commodities (Pyt) Ltd, n’est ni fournisseuse ni prestataire de services du Parc agro-industriel de Bukanga Lonzo? Sur papier Feed Africa Sarl exerce des activités d’exploitation agricole et d’élevage, de parc et de tourisme et parc, les mêmes que Africom Commodities.
Autre piste hautement suspecte : Feed Africa Sarl vient au monde le 24 juin 2014 quand, moins d’un mois plus tard, le 15 juillet 2014, Kabila lance Bukanga Lonzo. Hasard de calendrier? Quand, dans son rapport fuité, l’Inspection Générale des Finances conclut à une « planification » de cette pieuvre financière et désigne «l’auteur intellectuel» de la faillite de Bukanga Lonzo, ce service attaché au Président de la République, tient la vérité toute crue dans ses mains.
Cité dans l’enquête de Rfi, John Mususa Ulimwengu est conseiller principal du Premier ministre Matata Ponyo Mapon sur l’agriculture et le développement rural. Ce 16 mai 2014, deux mois avant le lancement officiel du parc agro-industriel de Bukanga Lonzo, il rédige une note adressée à « Son Excellence, Monsieur le Premier Ministre, chef de gouvernement » sur la création d’une société à caractère privé. « Votre entreprise, en partenariat avec les Sud-Africains s’appelle Feed Africa (nourrir l’Afrique, en français), elle vient de faire l’acquisition d’une exploitation de 10 000 hectares dans la région de Bukanga-Lonzo », détaille-t-il, écrit Rfi.
Puis : «Dans la note datée du 16 mai 2014, il y a d’autres éléments troublants. Le conseiller John Mususa Ulimwengu explique à son patron Matata que « le contrat pour le certificat d’enregistrement » pour ces 10 000 hectares de terres dans la région de Bukanga Lonzo « sera introduit au ministère des Affaires foncières » et que « les statuts de l’entreprise seront déposés au Guichet unique».
John Mususa Ulimwengu y détaille la répartition des parts des investissements à fournir par les différents actionnaires de ce qui doit devenir une exploitation agricole privée. 70% sont attribués à « SEMPM » [ndlr : Son Excellence Monsieur le Premier Ministre] et 30% aux « partenaires ».
Le montant total prévu était de 11,576 millions de dollars, dont plus de 8 millions devaient être apportés par Matata Ponyo Mapon entre juin 2014 et mai 2015. «Aujourd’hui, écrit l’enquête de Rfi, dans l’ancienne équipe de Matata Ponyo Mapon, beaucoup se dédouanent, mais admettent la mainmise du Premier ministre de l’époque sur le dossier et certaines irrégularités. «Je n’étais pas informé des détails, mais de nature, Matata Ponyo Mapon veut tout faire rapidement, ça peut heurter quelques règles », reconnaît un ex-collaborateurs.
« Sur un dossier comme Congo Airways, il avait fait confiance au ministre sectoriel, mais sur d’autres comme Bukanga Lonzo, il jugeait les ministres sectoriels faibles et avait pris les choses en main». Un autre justifie : « On nous avait dit que le gré à gré, c’était faisable.
On pouvait dire quoi ? Monsieur le Premier ministre, vous n’avez pas le droit?». Ce deuxième collaborateur admet même avoir eu vent de l’existence de Feed Africa et de cette ferme : « On nous disait que c’était une affaire privée du Premier ministre, ce n’était pas sur le site même. Pour y accéder, on devait traverser la rivière Lonzo. »
ALUNGA MBUWA.