- mar, 06/03/2018 - 16:51
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Une réunion événement. C’est celle qui a lieu mercredi 7 mars au Palais de la Nation certainement entre le Président de la République Joseph Kabila Kabange et un club de huit grands patrons représentant certainement les plus grosses entreprises minières opérant dans le pays. C’est l’increvable ministre des Mines Martin Kabwelulu qui en a fait l’annonce après les avoir invités à se rendre dans la Capitale. Kabwelulu répondait à une lettre de ces sociétés minières adressée au Président de la République dans laquelle ces Grands patrons sollicitaient, une semaine auparavant, une audience d’importance évidente auprès du Chef de l’État congolais en vue de faire valoir leurs points de vue sur le nouveau code minier adopté, au cours de la récente session extraordinaire, par le Parlement congolais. Selon toute vraisemblance, Mark Bristow, Ivan Glassenberg, Steel Li, Marc Davis, Lars Ericksen Johansson, Qixue Fang, Robert Friedlan et Hon Chun So, respectivement PDG de Randgold Resources, PDG de Glencore, Chairman de CMOC, DG des Opérations de MMG, PDG d’Invanhoe Mines, Président de Gold Mountain International/Zijin Mining Group, Chairman et Exécutif d’Ivanhoe Mines et Directeur Exécutif de Crystal River Global Ltd, seront les hôtes du Chef de l’État congolais.
Ces entreprises minières s’opposent à certaines dispositions de la nouvelle législation minière, estimant qu’elles risquent d’étouffer les opérateurs du secteur.
Parmi les dispositions épinglées dans cette nouvelle loi congolaise, la hausse de la taxation des superprofits et de la redevance minière qui passe de 2 à 10%, la réduction de certains avantages douaniers ainsi que l’annulation du système d’amortissement hyper rapide sur les capitaux et sur les biens d’équipement. Les représentants de la société civile de RDC qui se réjouissent de l’adoption de celle loi minière soupçonnent cependant les opérateurs miniers de chercher à dissuader le président Kabila de promulguer le nouveau Code minier en l’état.
AU CENTRE DU MONDE.
Bien qu’adopté, ce code tarde en effet à être promulgué, signe que le Président de la République ne saurait être sourd aux avis d’un secteur aussi sensible à la marche de l’économie mondiale.
Après l’uranium de Tschinkolobwe, au Katanga, qui permit à l’Occident de gagner la IIème guerre mondiale en se dotant des capacités de la bombe atomique, voici donc notre pays à nouveau là où il a toujours été, c’est-à-dire, au centre du monde. Au pays de savoir conduire ce débat avec doigté, en négociant et expliquant à ces partenaires, dans la sérénité nécessaire, les intérêts communs qui passent par ceux du pays et du peuple congolais. Au sortir de la IIème guerre mondiale, le Congo aurait dû être à la table des vainqueurs. Il en avait été exclu. On connaît la suite. D’après la société civile, le nouveau code minier met fin à une clause de stabilité qui, dans la loi en vigueur, protège les opérateurs miniers contre le changement du régime fiscal et douanier durant dix ans. Il va sans dire que ce nouveau code minier permettra au Congo de tirer profit de son cobalt, très prisé actuellement dans le secteur de l’automobile. La production de cobalt est centrale pour le monde des technologies et notamment pour des fabricants de smartphones. C’est le cas de l’Américain Apple dont on connaît le poids sur le marché mondial. Du coup, l’entreprise a pris les devants pour ne pas souffrir d’une éventuelle pénurie. Si l’intérêt est la règle de la prudence comme le disait Vauvenargues, Apple se veut particulièrement précautionneux. L’entreprise est en pourparlers pour acheter des stocks de cobalt directement auprès des mineurs, selon des sources proches du média Bloomberg. Apple est l’un des plus grands utilisateurs de ce minerai indispensable pour les batteries de ses appareils. Jusqu’à présent, l’entreprise l’achetait aux fabricants.
Mais en négociant directement son approvisionnement de plusieurs milliers de tonnes auprès des mineurs sur les cinq prochaines années, l’entreprise s’évite les tracas d’une potentielle pénurie. Elle n’est d’ailleurs pas la seule à adopter cette stratégie. Le PDG de Glencore, Ivan Glassenberg, l’un des leaders mondiaux de l’extraction des matières premières, qui fait partie du team qui s’entretiendra mardi 7 mars avec le Chef de l’Etat congolais, a affirmé que plusieurs entreprises avaient amorcé les négociations avec lui.
Apple a entamé ces discussions pour un impératif logistique, mais également économique. Le prix du minerai a triplé ces 18 derniers mois et coûte désormais environ 80.000 dollars (65.000 euros) la tonne. L’émergence des voitures connectées menace d‘augmenter encore davantage le prix du Cobalt. La demande pourrait augmenter de plus de 9.300% d’ici à 2040, dans l’hypothèse où la demande de véhicules autonomes se généralise encore davantage, selon les Echos. S’il faut à peu près huit grammes de cobalt raffiné pour équiper les batteries de smartphones, une voiture électrique en nécessite en revanche 22kg.
Un risque de nature géopolitique pèse aussi sur Apple et l’industrie technologique en général. Le Congo, qui totalise 50% de la production de cobalt en 2016, souhaite instaurer une redevance sur les «métaux stratégiques». La liste sera définie par le Premier ministre et instaurera un taux d’imposition de 10%, alors qu’il a jusqu’ici été de 2%.
AVEC AGENCES.