Dans la grande chaudière congolaise
  • lun, 18/04/2016 - 07:00

Une patate chaude que les Nations Unies avaient refusé de prendre mais que l’UA avait accepté d’assumer. Pétri d’expérience, l’ancien premier ministre togolais Edem Kodjo le savait, dès le départ. Il doit désormais tenter de jouer le jeu. Sa réputation international en dépend.

Les mêmes qui en firent voir à l’ancien ministre d’Etat sénégalais, un certain Me Abdoulaye Wade devenu plus tard président du Sénégal.

FRAGILE SANTE.
Au sortir d’une audience à Limeté chez le Sphinx, lors des années Mobutu, le Sénégalais soupire avant de s’écrier: «Jamais, de ma vie, je n’avais vu une telle opposition! C’est l’opposition la plus bête du monde»! On connaît la suite... Me Abdoulaye Wade rendait le tablier...
Lundi dernier 11 avril, l’ancien premier ministre togolais, revenu des soins à Paris, et à la santé fragile, a surpris plus d’un - heureusement. Il annonçait la mise en place «en fin de semaine» du Comité préparatoire du Dialogue national, politique et inclusif avec les trois composantes classiques: majorité, opposition, société civile.

DU GRAND TSHISEKEDI.
Il attribuait à chacune d’elles son nombre: 12 à la majorité, 12 à l’opposition politique, 6 à la société civile. Immédiatement après, la majorité disciplinée (il lui arrive!), affinait sa liste autour de sa cellule de négociation partie à Rome en Italie et à Ibiza en Espagne. Se disait prête à la faire acheminer auprès du facilitateur international. A la Société civile, le débat s’engageait aussitôt. Celle-ci réclamait plus de mandats... au Comité préparatoire. Déjà! Difficile débat mais pas impossible! L’impossible débat a plutôt lieu au sein de l’opposition où l’UDPS estimait qu’il n’existait d’opposition que la sienne, celle qui se rangeait derrière le Sphinx. Un point, un trait! Que, du coup, tous les douze mandats lui revenaient d’office, à l’UDPS et à ses alliés. Que cette liste serait désignée par «le Président élu», et par «le Président élu» seul. à savoir Etienne Tshisekedi wa Mulumba! Tout le monde connaît qui sont les alliés de Tshisekedi: le groupe de Jean-Pierre Lisanga Bonganga - le Front du Peuple (Roger Lumbala - l’homme du M23 - en exil, Diomi Ndongala - l’homme de la prison de Makala, poursuivi pour viol de mineures, Mobutu Nzanga qui aurait cependant rejoint la Dynamique, autre aile de l’opposition...
Quant aux autres, ils n’ont qu’à aller paître ailleurs. Du coup, l’UDPS, comme à son habitude, déclenchait la énième «guerre mondiale» congolaise. Pour Tshisekedi, tout celui qui ne le rallie pas, est un «homme du pouvoir». Entendez: Kengo, Kamerhe, Bemba 1 (Eve Bazaïba), Bemba 2 (Thomas Luhaka), Moïse Katumbi et son G-7. Sans compter les Steve Mbikayi, Justin Bitakwira, Martin Fayulu, Clément Kanku, Delly Sesanga, Jean-Lucien Bussa, Jean-ClaudeVuemba, etc. Du Tshisekedi. Du Grand Tshisekedi. Du très Grand Tshisekedi... Plus il vieillit, plus il bonifie...

DEBLAYER LE TERRAIN.
Pour prendre à l’hameçon le Sphinx, Kodjo a tout donné. Il ne trouve aucune contradiction entre son rôle et le contenu de la résolution 2277 votée le 30 avril par le Conseil de sécurité de l’ONU. Le facilitateur désigné par l’Union africaine s’engage à respecter la Constitution ainsi que les délais constitutionnels. «Pensez-vous que je serais venu dans un pays que je respecte pour en tripatouiller la Constitution? Nous tous, nous sommes pour la résolution 2277», clame-t-il au groupe de Lisanga Bonganga qui l’interpelle, et qui justifie ses tergiversations: «On est d’abord en train de déblayer le terrain et au facilitateur de nous rassurer», expliquant: «Nous sommes dans le Dialogue, nous n’en sortirons pas. Au facilitateur de nous rassurer que nous sommes dans la résolution 2277. Le 24 avril, rien ne se passera! Nous l’avons fait savoir au président Tshisekedi. Au contraire, nous irons ce jour-là fêter le Dialogue...
Puis de poser une condition: «que le Pouvoir libère les prisonniers, les détenus politiques et les exilés». Il y a en effet risque pour Lumbala d’être conduit en prison s’il revenait, sans aucune garantie...
Puis Kodjo d’articuler sur le paragraphe 10 de la résolution 2277 de l’ONU.
Il soutient fermement le dialogue tel qu’initié par l’UA. «Nous sommes pour le respect scrupuleux de la Constitution et nous sommes pour le respect scrupuleux des délais constitutionnels requis», insiste-t-il.
Ainsi, explique-t-il, à la fin du processus, «des élections crédibles, libres et transparentes» sont fermement souhaitées. «L’UA et son facilitateur ne peuvent pas ne pas respecter les délais fixés par la Constitution».
Mais le parti de Tshisekedi a publié jeudi 14 avril un communiqué dans lequel il remet en cause sa participation au dialogue. «Le communiqué [de jeudi], je ne sais pas quelles dispositions précises cela répond.
Toujours est-il que nous continuons à compter avec un très grand parti dont la présence est tout à fait utile dans le dialogue», déclare l’ancien secrétaire général de l’OUA. Il est loin d’en avoir fini puisque le voici prêt à embarquer à bord d’un vol. Destination: Lubumbashi, dans l’ex-Katanga. Personne visée: l’ex-gouverneur de l’ex-Katanga, Moïse Katumbi, le patron du G-7. Pas avant d’avoir profité de l’occasion de l’investiture du président brazza-congolais Denis Sassous-Nguesso pour faire un bilan mi-parcours à certains chefs d’Etat africain. A Mme Nkosazana Dlamini-Zuma, la présidente de la Commission de l’UA, qui lui a passé la patate chaude congolaise...
ALUNGA MBUWA.


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