- lun, 19/08/2013 - 05:46
La rencontre de Brazzaville a collapsé Sassou Nguesso littéralement humilié
Tshisekedi n’a pas fait la traversée du fleuve samedi 17 août. Il n’a pas rencontré le chef de l’Etat brazza-congolais, Denis Sassou Nguesso et l’a clairement vexé. Alors que son directeur de cabinet Albert Moleka, un conseiller Valentin Mubake et son épouse Marthe l’attendaient au salon, que la rencontre avait été fixée à 11 heures à Brazzaville, Tshisekedi s’est enfermé dans sa chambre toute la matinée et n’en est sorti que peu après midi. Moleka qui avait fait des va-et-vient entre Kinshasa et Brazzaville, est reparti présenter «les excuses» du Spinhx de l’UDPS. A la presse à Brazzaville, il s’est fendu d’une déclaration soporifique. «Je suis venu transmettre le message du président Etienne Tshisekedi à son frère le président Denis Sassou Nguesso pour lui faire part des détails de l’empêchement un peu sérieux». Président de l’UDPS ou président de RDC?
Moleka n’a pas répondu se contentant de dire que les deux hommes se verraient «très bientôt», dès que l’agenda du président Sassou le permettrait. Puis de botter en touche sur les concertations nationales dont un présidium et un comité de contact ont été installés: «Sassou Nguesso est mwana ya mboka» (fils du pays). En refusant de se rendre à Brazzaville, Tshisekedi a fait montre d’un manque de considération pour un Chef d’Etat. Il perd encore un peu de sa crédibilité. Son entourage invoque un piège. La vie de Tshisekedi est hérissé de pièges «évités». Lui seul a raison, personne d’autre.
Voilà soigne l’image d’un homme «qui n’y arrivera jamais».
- Le 22 juillet 1991 - en pleine crise de la CNS, alors que opposition et pouvoir s’accordent sur une CNS (Conférence nationale souveraine) avec des décisions «exécutoires» - un flash télévisé annonce que Mobutu a nommé Tshisekedi Premier ministre, l’ancien Premier ministre proche de la BIRD et du PNUD Mulumba Lukoji est démissionné de fait. Sous la pression de ses «combattants» qui menacent de transformer sa maison en feu, Tshisekedi recule.
- Le 24 juillet 1991, l’ex-Premier, Mulumba Lukoji, est reconduit.
- Le 30 juillet 1991, la CNS est reportée au 7 août. Mais des scènes de pillages ont lieu dans la Capitale du 23 au 26 septembre 1991, perpétrées par les soldats, puis par la population. Une grande partie de l’infrastructure de la ville est détruite. Mêmes scènes dans d’autres grandes villes du pays. La France et la Belgique envoient des troupes pour évacuer leurs ressortissants. Environ 9.000 résidents étrangers d’une trentaine de pays sont évacués. Les émeutes ont fait officiellement 117 morts.
- Trois mois après la première tentative, le 1er octobre 1991, Tshisekedi est à nouveau nommé Premier minis. Mais lors de la cérémonie de prestation de serment au Palais de Marbre, il crée un incident: devant caméras et officiels au Palais de marbre, il supprime au stylo-bille la mention «le Président de la République est garant de la Nation». Il affirmera ne pas être «le Premier ministre du Maréchal Mobutu» même s’il avait accepté d’être nommé par lui. Mobutu voulut le ramener à la raison. Après deux jours de tractations - Mobutu ayant dépêché ses conseillers au domicile de Tshisekedi porteurs d’une copie immaculée de l’engagement constitutionnel afin que Tshisekedi appose sa signature - le président révoque Tshisekedi qui promet de se réinstaller de force.
A son arrivée le lendemain à la Primature, Tshisekedi est accueilli par des chars. Il doit se contenter de s’asseoir sur le sol, dans la rue, devant la Primature avant d’en être délogé. S’en suit une critique violente à l’endroit de Tshisekedi notamment de Nguz a Karl i Bond. Barack Obama avait dû recommencer sa prestation de serment en petit comité, ayant sauté un mot dans sa prestation publique.
- Mobutu a confié le Gouvernement aux secrétaires généraux de l’administration publique avant de désigner le 23 octobre 1991 Bernadin Mungul Diaka Premier ministre.
- Le 22 novembre 1991, en présence des représentants de l’Organisation de l’Unité Africaine, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, président et ministre d’Etat sénégalais, arbitrent au Palais de Marbre un accord entre l’opposition et le pouvoir en marge de la CNS. Ce sont les «accords du Palais de marbre». Le principe: le Premier ministre sera issu de l’opposition (Union Sacrée).
- Le 25 décembre 1991, Nguz a Karl i Bond est nommé Premier ministre. Tshisekedi a raté le coche.
- Le 12 décembre 1991, la CNS se dote d’un bureau provisoire dont le Président est l’archevêque de Kisangani, Mgr Laurent Monsengwo Pasinya.
- Face aux discours enflammés à la CNS, Nguz suspend ses travaux le 16 janvier 1992. L’opposition se mobilise.
- Le 16 février et le 1er mars 1992, répression sanglante d’une «marche des Chrétiens».
- Le 6 avril 1992, réouverture de la CNS suite aux pressions internes et externes.
- Le 14 août 1992, Tshisekedi est élu par la CNS Premier ministre de transition avec 70,8% des voix devant son adversaire Thomas Kanza. Tshisekedi nomme ministre des Finances son infirmier et refuse de présenter le Budget. La cohabitation avec Mobutu est houleuse.
A la télé, le Premier ministre traite Mobutu de monstre.
- Le 1er décembre 1992, Tshisekedi crée un incident en démonétisant les billets de 5.000.000 de zaïres que la Banque nationale avait émis.
- Le 6 décembre 1992, clôture de la CNS, qui n’a pas débattu des deux dossiers dits «sensibles»: celui des assassinats et des biens mal acquis. La CNS a mis en place un Acte constitutionnel de transition, un gouvernement de transition, le Haut Conseil de la République et le Conseil électoral. Elle a élaboré un projet de Constitution et un calendrier électoral. Mais, Mobutu s’oppose au gouvernement de transition et ne reconnaît que sa Constitution. Alors que le taux d’inflation culmine les 7.000%, en janvier 1993, les soldats du camp Kokolo et ceux du Centre CETA (Centre d’entraînement des troupes aéroportées) se répandent dans les rues de la Capitale. Nouvelles scènes de pillages. Le 29 janvier, l’ambassadeur de France, Philippe Bernard, est tué dans son bureau par une balle qui perce son bureau.
- Mars 1993, Mobutu réunit un conclave où ne prennent part que les membres de sa mouvance et à l’issue duquel Faustin Birinduwa, est nommé Premier ministre. Le pays vit un dédoublement des institutions: celles de la CNS et celles du Conclave qui a le soutien de l’armée.
- Avril 1993, massacres interethniques dans le Masisi (Nord-Kivu), entre populations Hunde et Banyarwanda. Les pertes en vies humaines se comptent par milliers.
- 14 janvier 1994, signature d’accords entre la mouvance présidentielle et l’opposition représentée par l’Union sacrée de l’opposition radicale et alliés (USORAL), accords visant à mettre fin au dédoublement des institutions. Le Parlement de transition intègre l’ancienne assemblée nationale et devient le Haut Conseil de la République-Parlement de Transition (HCR-PT).
- Le 8 avril 1994, adoption par le HCR-PT d’un nouvel Acte de transition. L’Acte issu de la CNS a été amendé de façon à satisfaire les exigences de la Mouvance présidentielle.
- Le 14 juin 1994, Léon Kengo wa Dondo est élu Premier ministre par le HCR-PT.
- Juillet 94, 1,2 million de Rwandais fuient leur pays et se réfugient dans le Kivu et s’installent dans des camps près de Goma et de Bukavu. Accueillis au départ, cette présence crée d’énormes problèmes économiques, sociaux et écologiques.
L’«opération Turquoise» au Rwanda, montée par la France, remet Mobutu sur la scène internationale. Le 10 août 1994, la France annonce la reprise de sa coopération avec le Zaïre.
- Octobre 1994, le Premier ministre Kengo prononce un discours à l’ONU. Il visite les USA, la France, la Belgique en quête d’aide. L’aide lui est promise à condition qu’il fasse la preuve de sa capacité à contrôler l’armée et la Banque du Zaïre.
- Novembre 1994, Mobutu participe à Biarritz (France) au sommet franco-africain. C’est l’anti-discours de La Baule. La France déclare que les intérêts économiques doivent prendre le pas sur les considérations liées aux droits de l’homme.
- 27 juin 1995, destitution de Mgr Monsengwo de la présidence du HCR-PT. Une liste de 510 signatures (sur 738 possibles) de personnes la réclame. Entre autres reproches, il aurait permis à Kengo de prendre la Primature à la place de Tshisekedi.
- 22 juillet 1995, Mobutu prend une ordonnance portant réaménagement de l’équipe Kengo. L’opposition s’attend au retour de Tshisekedi comme Premier ministre élu par la CNS. Il a été floué lors de ses contacts avec les FPC (Forces Politiques du Conclave, mouvance présidentielle). Kengo reste Premier ministre. Le nouveau gouvernement marque le retour en force de personnalités de la IIème République (Pay Pay, Katanga, Singa Udju, etc.)
- Janvier 1996, un nouveau gouvernement est formé qui n’est pas de large union nationale. L’USORAL réclame toujours «le retour à la légalité» de Tshisekedi et refuse de faire partie d’un gouvernement Kengo.
- La dégradation politique à l’interne pousse à l’émergence de la rébellion de l’Afdl. Face à la lassitude générale, le pays et Kinshasa lui font un triomphe. C’est la fin du régime Mobutu. Tshisekedi reste l’homme des occasions manquées.